Groupe: Sólstafir
Album: Berdreyminn
Date de sortie: 26 mai 2017
Label: Season of Mist
Berdreyminn est le 6ème album de Sólstafir, groupe Islandais fondé en 1995, qui a su faire évoluer son style du Black Metal le plus rugueux à un Post-Rock éthéré, facile à aimer par le plus grand nombre.
J’avais chroniqué leur précédent opus, Ótta, sorti il y a presque 3 ans, déjà, et je m’étais réjouie de ce voyage auditif très évocateur.
J’ai un avis plus réservé à propos de Berdreyminn. L’intro de « Silfur-Refur » nous projette dans ce même univers de western nordique qui fait la marque originale de Sólstafir. La voix de Aðalbjörn Tryggvason est toujours là, écorchée, faisant passer toutes sortes d’émotions, de la mélancolie à des nuances plus rageuses.
L’idée d’ajouter une voix lyrique prenant le relais et amplifiant l’émotion sur « Hula » est une très bonne idée, et ça fonctionne si on ne réfléchit pas trop. Mais c’est peut-être là le problème : Berdreyminn est un peu trop cérébral, trop étudié.
Et puis il y a ce son 80’s sur « Isafold » mais aussi ailleurs. Ça sonne daté, et m’empêche de rentrer pleinement dans le voyage par ailleurs trépidant.
« Hula » revient aux fondamentaux du groupe : mélancolie, suave amertume. La voix du chanteur y est donc relayée par une voix féminine lyrique, elle-même suivi de notes cristallines qui s’égrènent doucement, un motif récurrent des Islandais. Le morceau finit étrangement, sans vraie conclusion.
On enchaîne sur « Naros », au début presque dépressif, mais trompeur, puisque la voix et la guitare se font ensuite hargneuses et virulentes. En arrière-plan des voix presque inaudibles, comme des voix de fantômes, et la fin du morceau, brusquement.
« Hvít Sæng » est peut-être le titre qui me plaît le plus, le plus honnête et le plus prenant. Ses 7 minutes et 23 secondes semblent bien plus courtes que celles d’autres morceaux.
« Dýrafjörður » ensuite. Ballade lancinante, belle, mais, hum… un peu lassante.
« Ambatt » commence avec des chœurs étranges, et des notes encore une fois très 80’s à mon oreille. La voix se fait caressante, le rythme est erratique, je m’y perds puis me raccroche au solo très saturé. Le tout est sous-tendu par un battement presque angoissant. La deuxième partie du morceau est une boucle reprenant le solo de guitare porté par les mêmes notes de piano répétées sans fin et avec brio.
Enfin, « Bláfjall » clot Berdreyminn. La voix de Tryggvason se fait plus pressante, de même que le rythme de la batterie. La guitare est magnifique de réverb’. Le morceau se déroule en cavalcade sur 8 minutes, pour se terminer brutalement.
L’artwork est magnifique, créé par Adam Burke : un paysage lacustre en aquarelle dans les tons bruns, avec la silhouette d’une femme dans l’eau caressant un renne, silhouette juste évoquée. Le tableau est sombre à gauche et s’éclaircit vers la droite. Un paysage de rêve, en lien avec le titre, Berdreyminn : « le rêveur d’événements à venir ».
Au final, cet album me laisse un goût étrange. Les Islandais ont voulu explorer de nouveaux territoires, il en résulte une forme d’étrangeté, de dissonance qui peut désarçonner.
Là où Ótta, album concept, avait un plan et une structure bien étudiés mais insensibles à l’oreille, là où Ótta suscitait chez l’auditeur des émotions variées et intenses, Berdreyminn est plus chaotique dans sa composition, tout en étant plus réfléchi et par là peut-être moins sincère. Ça reste du Sólstafir, l’œuvre d’un groupe de premier plan dans la scène multi-forme du Post-Rock.