HOT on the rocks!

DZ METAL (LELAHELL / ACYL) à la Station le 2 juin 2017

lundi/05/06/2017
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La Station est une friche industrielle située Porte d’Aubervilliers à Paris, juste de l’autre côté du périphérique, à la lisière du département Séquano-Dionysien voisin. Il s’agit de l’ancienne Gare des Mines, mise à disposition il y a un an par la SNCF à l’asso Collectif MU, pour y organiser des spectacles et autres événements culturels. Une scène et tout le matériel idoine y ont été installés (très belle sono), ainsi qu’un bar, un restaurant, des transats et même un Baby-Foot. Urbain mais Cosy. A peu de choses près, on pourrait se croire propulsé quelque part dans Berlin. A ceci près que tout le monde y parle la langue de Bernard Pivot… à commencer par les deux groupes invités ce chaleureux soir de début juin par le Collectif MU en collaboration avec l’Institut des cultures d’Islam :  Lelahell et Acyl. La soirée a été baptisée « DZ METAL », et met le Metal Algérien à l’honneur. Ramadan oblige, elle commencera vers 22 heures 30. En attendent, le DJ chauffe ce mini-Fest avec « I’m Broken » de Pantera…

http://www.mu.asso.fr/station/

Lelahell ouvre ces hostilités pacifiques. Devant un parterre constitué d’une simple trentaine de convives, mais acquis à leur cause, le trio Algérois formé en 2010 clôt par cette apparition une tournée européenne de mai les ayant vu secouer Londres (l’« Incineration Fest » en compagnie de Sodom, 1349 et Samael), Leipzig, Prague, Graz ou encore Milan. Dans la Kabbale, l’ange Séraphin Lelahel symbolise la créativité et le dynamisme. Bien vu. Redouane Aouameur le placide mais costaud (ou l’inverse : costaud mais placide) chanteur-guitariste, est imperturbable, délivrant un set dans la plus grande tradition Death. « BONSOIRRRRRRRR PARRRRRRRRIS NOUS SOMMES LELAHELL D’ALGERRRRRRRRIE !!! » assène-t-il à l’issue du premier morceau. L’ambiance montera au fur et à mesure de la prestation : les metalheads abandonnant leurs transats les uns après les autres, afin de se rapprocher des trois durs. Certains Headbanguent et scandent. Plus grande tradition Death, car rien ne distingue ces trois musiciens de leurs homologues d’ailleurs… si ce n’est que l’accent chantant du Frontman lorsqu’il s’adresse à son public entre deux assauts sonores. Sa guitare semble sonner de meilleure manière que sur disque. L’autre point fort du groupe est incontestablement le batteur, frappe brute et technique. Le point faible (le regret à dire juste) : un set un peu trop court. Redouane remercie et annonce au micro installer sur-le-champ un Stand de Merch « afin de nous soutenir ». Le mec de l’asso manque de tomber de son escabeau en enlevant le fond de scène noir frappé du logo blanc du groupe. DIY.

Acyl sera l’autre visage du Janus de ce soir. Un style différent voire opposé, mais complémentaire. Les cinq maillons optant quant à eux pour une fusion entre sonorités maghrébines et grosse guitare à la Pantera. Sur la scène sont disposés des instruments de musique Nord-Africaine : derboukas, bendirs et karabous. Tout le long du spectacle, un écran va diffuser en parfaite synchronie des vidéos illustrant les thèmes des morceaux, soit tirées des vidéos du groupe, soit provenant d’archives culturelles ou historiques, la première étant une manchette de presse annonçant en noir et blanc de « graves troubles en Algérie ». Une bannière marquée du logo du groupe trône sur le côté. Logo dont la forme du Y en rappelle vraisemblablement une autre, l’AZA Amazigh, symbole de la Kabylie. Cette fois, l’intégralité du public est débout et se masse devant. Et danse. Car la musique d’Acyl est faite de rythmes, traditionnels ou non. Les musiciens dansent eux-aussi, à commencer par le charismatique Amine, géant chauve barbichu en chemise noire, un cousin pas si lointain de Buriez. Qui psalmodie les textes de façon lancinante, puis donne de sa gutturale voix façon Anselmo. Cette alternance est presque fascinante. L’intensité évoque parfois No one is innocent. Dansent… et entament tous ensemble des chorégraphies. Parfois têtes baissées, séparés. Parfois tapant des mains à l’unisson, regroupés. Certaines chansons, à l’image de « Finga » sont mémorables. Mémorables, c’est-à-dire dont on se souvient sans peine une fois le concert achevé. Comme pour leurs amis de Lelahell (Redouane désormais en bas de la scène devant son stand, sera remercié par deux fois par Amine), le Show semble un peu trop court. Partie remise.

Les cinq d’ACYL rangent ensuite leurs instruments et décors, puis descendent installer à leur tour Fissa Fissa leur étal (« c’est comme au marché » s’amuse le guitariste tout en déballant la toile). Sous la voûte étoilée, les huit protagonistes de ce soir échangent anecdotes, sourires, blagues et accolades avec les convives, puis font des photos-souvenir avec eux (dont on sent que certains n’en sont pas à leur premier concert). Le batteur de Lelahell m’expose jouer également dans un groupe de Black. On cite au fil de la discute Fellag, Zidane, et le Hellfest (avec Obituary). La puissante sono de La Station diffuse à ciel ouvert « Tizi Ouzou » d’Idir, comme un symbole. Il est temps de délaisser pour de bon son transat afin de donner la parole au débonnaire mais puissant (ou l’inverse…) Redouane, lequel se prête à un ITW dans le restaurant attenant. Nous sommes déjà une heure et demie au matin du 3 juin. Lelahell et Acyl, deux versions (très) différentes du Metal Algérien, viennent de délivrer leurs messages avec la même ferveur. Ces gens-là sont des passeurs. Et méritent toute l’attention qu’il se doit.

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