Art N Roll était au Hard Rock café pour interviewer Bruno Blackstard, guitariste du groupe Shaârgot. Le groupe sort un nouvel EP « Break your body ».
Art N Roll : Est-ce que tu peux présenter ton parcours jusqu’à ta rencontre avec Etienne et la création de Shaârgot ?
Bruno Blackstard : J’ai commencé par faire de la batterie pendant douze ans. J’ai commencé à composer et je me suis mis au clavier, puis j’ai ressenti l’envie de passer à la guitare et de faire de la basse. J’avais mon petit studio chez moi, mais j’ai toujours aimé jouer en groupe. Et puis pendant un moment j’ai un peu laissé de côté la partie musique pour m’intéresser au visuel. J’ai commencé à faire du VJing , des lights et puis de la conception de décors pour des amis à moi qui étaient en demande de personnes avec un sens artistique, pour leurs soirées. En 2013 j’ai rencontré Etienne dans une soirée dans laquelle je travaillais. On a commencé à parler de son projet, et il m’a dit qu’il me ferait écouter ce qu’il faisait.
Il faut savoir que dans ces soirées, il y a beaucoup de monde avec des groupes, des projets, mais rien derrière. Je l’ai recroisé, il m’a donné un CD et là j’ai pris une claque : c’était un CD fini, masterisé. Et un jour je me suis retrouvé en répète pour faire un essai, je tenais un poste multi instrumentaliste. On attendait un guitariste, qui n’est jamais venu. J’ai donc branché ma guitare, et avec l’ingé son qui est aussi le producteur du groupe on a commencé comme ça, à défricher ce qu’il y a avait en CD. Parce que transcrire ce qu’il y a sur CD en live c’est beaucoup de travail.
ANR : Donc tout est parti des compositions d’Etienne ?
Bruno : Tout à fait. Etienne c’est le compositeur, c’est son univers. Quand il a une idée on travaille tous ensemble dessus avec plusieurs phases. Il défriche ses idées avec Clem X, la bassiste, ensuite j’arrive quand le morceau est à 60%, puis ça passe dans les mains de notre ingé son. Il prend le morceau, il a carte blanche pour retravailler le morceau. Il coupe, il découpe et on accepte.
ANR : Comment se passe la découverte du rendu final ? Vous êtes tous ensemble dans une pièce et il vous fait écouter ce qu’il a fait ?
Bruno : Oui c’est ça. On l’appelle Godfather, dieu père de la musique, il prend le morceau et nous dit comment il faut faire. A chaque fois c’est génial. Il a le recul que l’on ne peut pas avoir dans le processus de création/adaptation. C’est l’homme que l’on ne voit pas et c’est l’élément indispensable.
ANR : C’est Etienne qui chante ?
Bruno : Etienne chante sur tous les morceaux sauf le dernier (Bucolikiller), qui est un remix du groupe HeYs. Il nous a demandé de reprendre un morceau, et Etienne et Clem lui ont dit qu’on allait garder que sa voix. Je ne suis pas intervenu dedans.
ANR : J’ai écouté l’EP en commençant par ce morceau, j’ai été surprise, ça ressemblait tellement à Korn au niveau de la voix.
Bruno : Ah oui, c’est tout à fait ça. Donc je confirme ce n’est pas du tout Etienne qui chante là-dessus. (rires)
ANR : La partie visuelle est une dimension très importante de votre groupe. Je crois comprendre que le personnage de Shaârgot est né bien avant le groupe, tu peux nous en dire un peu plus ?
Bruno : Le personnage est né, dans l’esprit d’Etienne, suite à une erreur au niveau d’un laboratoire. Une expérience a dégénéré, ça a abouti à un problème cérébral qui a augmenté tout ce qui était négatif dans la personne, et un champignon noir a recouvert toute sa peau. Le côté instable de la personne a pris le dessus, c’est devenu un personnage qui pourrait être dans Gotham.
ANR : Comment as-tu réagi quand il t’a présenté ce personnage ?
Bruno : Je lui ai dit « il faut que je sois en noir aussi ?» (rires) Il m’a dit oui, obligé. Mon personnage sur scène est comme lui, il est infecté par ce champignon noir.
ANR : Et pour arriver à ce résultat comment ça se passe en coulisse ? Combien de temps de préparation ?
Bruno : Il y a entre 1h et 1H30 de préparation selon les personnages. On fait tout nous-même. On a toujours quelqu’un qui passe à qui on demande de l’aide pour le dos par exemple. Le plus contraignant pour les orgas c’est d’avoir le nombre de miroirs suffisant, parce qu’on ne peut pas attendre que l’un ait fini pour que l’autre commence.
Mais ce n’est pas la préparation qui compte, c’est l’après concert ! (rires)
ANR : Oui c’est ce que j’allais te demander !
Bruno : C’est 2h pour tout enlever. C’est un maquillage assez gras, il faut tout enlever à la lingette.
ANR : A partir du moment où tu es prêt à monter sur scène, est-ce que ta personnalité change ?
Bruno : Ah oui carrément. Je ne suis pas très rituel, je suis quelqu’un qui est toujours en train de parler et de rigoler. Mais au fur et à mesure que je fais mon maquillage on m’entend de moins en moins. Je m’isole dans mon personnage. Une fois que je suis complètement prêt je ne rigole plus du tout.
ANR : Est-ce que tu as pu discuter des traits de personnalité de ton personnage avec Etienne ? Est-ce que tu as eu un peu de liberté là-dessus ?
Bruno : Avec Etienne nous sommes très connectés dans le même monde, nous avons les mêmes influences cyberpunk. Mon personnage est né suite à une forte remise en question après notre premier concert. Quand on a vu les photos on a remarqué tout ce qui ne fonctionnait pas. On a eu 3 semaines pour rectifier le tir, mon costume, les maquillages, le costume du batteur. Par exemple on avait pensé aux lunettes pour le batteur, mais pas aux ventilations, alors il s’est retrouvé avec plein de buée.
ANR : Les costumes vont évoluer ?
Bruno : Je suis en négociation pour un costume d’été, mais il ne veut pas ! (rires) Je perds un peu en mobilité, mais c’est surtout la chaleur !
ANR : Si on revient sur l’EP, il est là en attente de l’album ?
Bruno : Oui, il y aura toujours un EP, puis un album. L’EP étant un extrait de l’album avec un ou plusieurs bonus, comme le remix. D’ailleurs on a des idées pour étoffer ces bonus avec des vidéos par exemple, ou une BD.
ANR : Quels étaient les challenges de ce nouvel album ?
Bruno : Ce qu’on a accentué c’est aller plus dans les sons un peu sombres. L’atmosphère est plus pesante. On a appris des 30 dates que l’on a faites. On a baissé les tonalités, on a travaillé sur les ambiances pour que ça décuple notre univers sur scène.
ANR : Pour toi, sur scène à la guitare ça doit être plus plaisant de jouer ces morceaux plus sombres.
Bruno : Ah oui, tout à fait. Ça correspond plus au personnage aussi. Nous sommes toujours à la recherche de perfection pour que le côté visuel et musical s’imbrique. D’ailleurs on aimerait beaucoup avoir notre propre décor.
ANR : Avec cette prédominance visuelle, je suppose que les clips c’est un aspect que vous voudriez développer ?
Bruno : Dès le premier clip, il y avait des gens de talent qui sont tombés amoureux du projet et qui sont encore avec nous. Ils font partie de l’aventure. Il y a comme un contrat moral avec eux, ils sont payés, mais ils ne demandent pas leur tarif habituel. Ils veulent s’investir.
ANR : Je te laisse le mot de la fin.
Bruno : Shaârgot c’est une aventure humaine. Il y a beaucoup de personnes qui gravitent autour du projet, et ça se ressent sur scène, car nous sommes vraiment heureux de jouer sur scène. On est contents de jouer tous ensemble et d’entraîner dans notre sillage des gens que l’on apprécie beaucoup.