Hellfest 2018 – Vendredi 22 juin
Petite mise en jambe la veille avec Full Throttle Baby au Metal Corner qui crachent ses tripes avec son Rock n’ Brawl. Autre mise en jambe, plus terre à terre cette fois, puisqu’il s’agit de visiter le site avec le chef qui me fait découvrir les installations que je n’avais pas vu. En effet, ma dernière visite à Clisson remonte à 2014.
Et le moins qu’on puisse dire, c’est que le Hellfest est devenu un grand terrain de jeu pour metalleux ! Ça pourrait tomber dans le Disneyland, mais les organisateurs ont évité cet écueil. Tout a été mis en place en réponse aux demandes des festivaliers : plus de points d’eau, plus de chiottes (il y a même des chiottes à compost!), plus de propreté, plus de bars… On peut prendre le frais au Hellfresh avec ses brumisateurs, ou se tremper les os avec non pas un mais deux portiques géants dont les rideaux aquatiques forment motifs et lettrages. L’élément feu est bien représenté également avec une boule géante au-dessus du bar central, boule qui fume le jour et s’enflamme dès la nuit tombée. Idem autour de la Warzone, avec son mur façon prison : des lance-flammes égayent régulièrement le paysage nocturne. Je ne te parlerai pas des nombreux pôles restauration, de la dark forest, du Hell City Square et du Hell Gate, sinon ma chronique n’y suffira pas !
En tous cas, ce tour du site m’épate. Mais il est temps de procéder à un décrassage auditif avec Bukowski sur la Mainstage, dont le chanteur est le même bonhomme qui officiait hier avec les Full Throttle Baby. Prestation bien charpentée malgré le soleil et l’horaire relativement matinal. La batterie est puissante et soutient parfaitement basse et guitare. Le son est propice à l’un des premiers circle pits du week-end.
Je me dirige ensuite vers la Warzone pour voir Spermbirds, rescapés de l’époque Punk puisqu’ils se sont formés en 1982 ! Les membres ont l’air d’employés modèle, et pourtant ça pète ! Enfin, au moins pendant les deux premiers morceaux, parce qu’après ça, le chanteur montre quelques signes d’essoufflement.
J’ai la bougeotte, alors je file vers la Valley, pour voir Dopethrone dont on m’a dit le plus grand bien. Le groupe canadien jouait la veille pour la Défaite de la Musique organisée par Stoned Gatherings devant l’UFO. Ils n’étaient pas seuls, outre les 300 personnes venues les voir, les passants et voisins ébahis de tant de déferlement sonore, il y avait aussi Sons of Otis, Bongzilla et EyeHateGod. Mais oui Madame ! Il se trouve que sur leur chemin vers le Hellfest, il y avait Paris un soir de fête de la musique, alors pourquoi pas ?
Perso, je ne raterai que Sons of Otis au Hellfest, faute d’inattention, mais que veux-tu, je ne peux pas être partout ! Bref, Dopethrone, de la balle, tabarnak ! Oui, Vincent, chanteur à dreadlocks longues comme lui, nous fera crier Tabarnak sous la tente de la Valley, et ça c’est réjouissant. Côté musique ça l’a bien fait. Sludge de très bon niveau, voix criée, massage de différents organes internes selon les morceaux : zone pelvienne, cage thoracique, jambes, et bien sûr, tympans.
Les problèmes techniques n’amoindriront pas vraiment le set selon moi. Le chanteur se fend d’un message à but éducatif : « ne fais pas confiance à l’Etat pour te conseiller les bonnes drogues. Par contre, ne touche jamais à l’héro ! » Merci Vince pour le conseil!
Sans transition, je vais voir un de mes groupes fétiches, Schammasch sous la Temple. Le son est radicalement différent. Comme sur l’album, la voix s’efface un peu trop à mon goût. Après l’efficacité de Dopethrone, il est un peu difficile de rentrer dans l’ambiance Black Metal Avant-garde des Suisses. Chaque membre a revêtu une tunique noire brodée d’or du plus bel effet, seul le chanteur porte une robe bigarrée et un maquillage noir lui recouvrant le visage comme un masque. L’ensemble est assez sophistiqué, pour une ambiance légèrement planante. Les lights virent à l’or pâle et à l’argent bleuté. Ils jouent Metanoia en fin de set et je suis aux anges ! C’est trop court mais c’est le jeu…
Après le Sludge et le Black Metal, je déambule sans vraiment de but à cette heure du jour. Sons of Apollo jouent en Mainstage, puis Rose Tattoo. Du bon Hard Rock et des groupes qui assurent le show.
Vers 16h, retour vers la Valley pour Bongzilla, mais pas sans faire un petit détour par la Temple pour une double dose de Trve Black Metal assenée par Nordjevel, formé en 2015. Corpse paint, longs pics sur les bracelets en cuir, noirceur norvégienne typique. Beaucoup d’influences se laissent entendre qui enrichissent l’œuvre du groupe mais sans en faire un pastiche. Ça fonctionne très bien ! A recommander aux amateurs de Black norvégiens.
Mais il est temps de rejoindre la Valley pour Bongzilla !! Au vu des corps étendus, c’est l’heure de la sieste ! Elle sera interrompue par l’arrivée des américains. Côté lights, ce sera vert comme la marie-jeanne, point. Côté son, ce sera Stoner bien gras, relevé par la voix râpeuse qui apporte la touche d’acidité nécessaire pour digérer cette tartine opulente.
Petite pause spatziflette chaudement recommandée par la collègue Mamy, aka Miss fromage depuis 2012 ! La Warzone est occupée par les Burning Heads pour une session punk à roulettes, bien rafraichissant sous le soleil qui ne nous lâchera pas pendant les 3 jours de fest’. Un mignon petit drone filme la foule, ses images retransmises sur les écrans de part et d’autre de la scène.
Toujours vaillante, je rejoins la Mainstage pile pour les titres cultes de Joan Jett, « I love Rock n’ Roll » et « I hate myself for loving you ». La chanteuse nous interdit de nous morfondre et de nous sentir vieux ou vieille avant d’entonner « Fresh Start ».
Une pause en mode rouleau compresseur avec Meshuggah, puis retour sous la Temple.
Maintenant c’est l’heure du sérieux, de l’agression gratuite, du chaos tel que je le conçois : Mysticum se met en place pour un show glacial et psychotique, exactement comme annoncé.
Les trois membres du groupe sont juchés chacun sur un piédestal orné de deux écrans fixés à angle aigu. Pas beaucoup de marge de manœuvre là-haut, la rage est donc concentrée. L’attitude fixe et martiale de Cerastes, Dr Best et Prime Evil avant le show ne présage en rien du déferlement d’images en noir et blanc et de leur Black Indus qui va saturer complètement le système nerveux de la foule devant eux. L’intro presque dansante est suivie d’une déflagration qui te fauche d’un coup ! Le lightshow est propice pour la nuée de photographes qui s’affairent à leurs pieds. Des images industrielles, militaires se succèdent sur les écrans à un rythme inhumain : pilons, parades et cimetières militaires, LSD, pentacles, aigle tout en angle… le strobo est au maximum, de même que les 3 qui nous assènent riffs et hurlements glaçants.
En sortant de ce show impeccable, je me fais la réflexion qu’un tel spectacle est un détecteur quasi parfait d’épilepsie.
Après une pause nécessaire en diable, je finis la journée par une double ration de gras fournie par Eyehategod, farceur qui, en prélude du concert, laisse sa guitare jouée une seule note façon sirène assourdissante. Eyehategod, aux origines du Sludge du bayou, cité par nombre de groupes, comme inspiration majeure, sera la cerise sur le gâteau de cette première journée riche en pépites !