Art’N’Roll : La première question serait de savoir à quel titre t’interviewer : en tant que collaborateur au nouvel album des Tambours du Bronx (« Weapons of Mass Percussion », sortie le 19 octobre 2018) ou en tant que membre du groupe ?
R : Non, on ne peut pas dire que je suis membre du groupe, plutôt « membre temporaire » un truc comme ça, ou « membre itinérant » (Rires) On doit trouver la formule…
ANR : Qui a eu l’idée de cette collaboration ? Comment s’est nouée cette alliance entre grandes figures de la scène Française ?
R : Il y a un an environ, j’ai reçu un coup de fil de Dom, qui fait partie des Tambours du Bronx, et qui s’occupe un petit peu du management, m’expliquant son désir de faire un album de Metal, et ce, notamment après leurs expériences au pluriel avec Sepultura. Une envie pour eux de pousser le bouchon plus loin dans ce style, car les Tambours du Bronx viennent plutôt du Punk. Donc, plusieurs membres du groupe avaient ressorti leurs guitares et leur basse. De plus, ils avaient déjà fait une proposition de collaboration auprès de Franky Costanza, batteur de Blazing War Machine et ex de Dagoba, ce qui a été déterminant dans leur volonté de monter ce projet. Lorsqu’ils m’ont demandé d’en faire partie, j’étais partagé : d’un côté, j’étais extrêmement motivé ; d’un autre, ce n’était pas sérieux du point de vue de gestion de mon emploi du temps, entre le nouvel album de Lofofora à promouvoir sur scène (NDA : « Simple appareil ») ainsi que mes deux projets parallèles, le premier qui s’appelle « Madame Robert » et le second qui se nomme « Mudweiser ». Je me suis toutefois dit que refuser une offre des Tambours du Bronx m’aurait causé des regrets à vie. J’ai donc essayé de trouver une solution, à savoir de se relayer sur scène entre plusieurs chanteurs : j’ai fait rentrer dans l’histoire Stéphane Buriez, le chanteur de Loudblast, ainsi que mon ami Renato, le chanteur de Trepalium, qui nous remplace au chant pour quelques dates, puisque Stéphane est en tournée intergalactique avec son nouveau groupe Sinseanum.
ANR : Tu connaissais personnellement Les tambours du Bronx auparavant ?
R : Nous avons eu l’occasion de jouer une fois ensemble, il y a une dizaine d’années environ, et nous avions super bien accroché. Les tambours sont le plus souvent programmés sur des plans évènementiels et des gros spectacles, contrairement à Lofofora, ce qui fait que nous nous croisions peu.
ANR : Tu l’avais écouté « Metal Veins » enregistré Live avec Sepultura à Rio en 2014 ?
R : Oui, bien sûr, comme beaucoup je pense…
ANR : Il semble cette fois plus qu’auparavant, les medias dits « Metal » soient à fond derrière vous ? Comment expliquez-vous ce soutien massif (et sincère) mais moins Mainstream que naguère ?
R : « Mainstream » me semble mal choisi comme terme : tu n’as qu’à passer une journée avec Les tambours du Bronx pour comprendre. Ils n’ont jamais changé de personnalité ou d’orientation musicale : cela demeure une bande de rustres qui tapent sur des bidons. Ils sont néanmoins prêts à jouer sur Times Square ou à Pékin pour je ne sais quelle manifestation, ou même en première partie de Johnny comme en l’an 2000 sur les Champs, ce qui représente pour eux une belle fenêtre de visibilité. S’ils ont la faveur des médias, ce serait un peu couillon de cracher dessus. Cela ne les dénature pas. Ils n’ont jamais cherché à faire un Remix avec David Guetta non plus…
ANR : Vous avez enregistré où ?
R : Dans leur studio. Cet album est un ensemble de riffs de guitare qui ont été composés sur des plans de percussion pure qui existaient déjà. Ils nous ont ensuite communiqué les instrumentaux, à Stéphane Buriez et à moi, afin que nous écrivions des paroles dessus. Nous avons ensuite enregistré des maquettes à Paris, puis avons répété tous ensemble avant de descendre chez eux à Nevers finaliser le tout dans leur studio.
ANR : Les paroles des vingt titres sont pour moitié en anglais et pour l’autre en français : c’est Stéphane Buriez qui a écrit en anglais et toi en français ?
R : Stéphane a effectivement écrit les titres en anglais et moi en français, sauf une chanson qu’il a écrit en français et une que j’ai composée en anglais… Sauras-tu les retrouver ?
ANR : A priori non, je vais cogiter… Et leur studio du Nivernais parvient-il à les contenir tous en même temps les tambours ?
R : Ils possèdent des locaux assez conséquents en banlieue de Nevers, avec leur bureau, un lieu à vivre, un studio d’enregistrement et à côté le hangar dans lequel se trouvent le local de répétition ainsi que l’atelier pour les bidons. Lorsqu’on réalise les prises, eux se trouvent dans ce hangar, et non pas dans le studio d’enregistrement. Ils auraient d’ailleurs du mal à tous y rentrer en même temps.
ANR : Qu’avez-vous écouté pendant la conception de ce disque ?
R : Pas trop d’écoute en commun. Moi, j’écoutais mes disques chez moi, beaucoup de Rhythm’n’blues, de Soul Music, du Blues et du Rock. J’écoute aussi du Metal, mais uniquement lorsque je suis sur la route, car j’ai des enfants et je ne veux pas leur écraser les tympans dès leurs plus jeunes années (Rires) Ce projet m’a fait penser à de vieux albums de Ministry, à Nailbomb aussi pour le côté Punk, Metal et sauvage à la fois. Et puis, j’adore le dernier album d’Iron Fire. Je possède une culture Metal qui n’est pas puriste du tout, je suis plutôt Rock et Punk. J’ajouterai les Young Gods aussi, avec lesquels nous avons également collaboré.
ANR : Comment animer ce projet en tournée ?
R : Il y a déjà eu quelques dates de réalisées. D’autres sont programmées, sur lesquelles je ne serai pas présent. Renato s’est chargé du chant à ma place sur celle de Sélestat la semaine dernière (NDA : le 21 octobre 2018). Nous repartirons je pense l’an prochain aux beaux jours, en fonction des dates que l’on nous proposera. Au début, il ne s’agissait que d’un simple projet, sans forcément d’enregistrement de disque à la clef. Comme ce projet a été véritablement opérationnel à compter de février – mars de cette année, il était un tout petit peu trop tard afin d’être être programmés lors des festivals de l’été, et ce, même si le Motocultor nous a fait une belle place. De plus, pas mal de programmateurs attendaient de voir… certains d’ailleurs m’ont confié avoir regretté de ne pas nous avoir pris cette année, notamment au vu de notre prestation au Motocultor en août. On verra donc l’année prochaine.
ANR : On peine à réaliser que l’expression « Armes de destruction massive » a déjà quinze ans tant elle est encore d’actualité… De quoi parles-tu dans les paroles de cet album ?
R : Tout dépend de la chanson… Je reprends les thèmes habituels des paroles de Lofofora. On vient de tourner le clip pour « Mirage éternel », dont les paroles sont un petit peu éthérées, et qui mélangent les figures de Lawrence d’Arabie et de la British Petroleum… Un autre morceau traite de la consommation excessive, de cette illusion de croire que l’on possède les objets bien plus qu’ils nous possèdent. Ou du Nutella aussi.
ANR : Nous sommes en 2018. Avec Lofofora tu viens de sortir un album acoustique. Tu viens également de mener à bien un projet avec Les tambours du Bronx. C’est par conséquent l’année de la mutation pour Reuno de Lofo ?
R : (Rires) Une mutation ? A bien y regarder non, les gens qui nous suivent de près ne sont pas tant étonnés que cela…
ANR : …Tu as vingt-cinq collaborations au compteur depuis tes débuts…
R : J’ai fait un tour sur Wikipedia une fois, j’ai vu cela. Bon, il en manquait quelques-unes… Je suis un gars qui apprécie les expériences, lorsqu’on me propose quelque chose de neuf, je ne refuse pas. Après avoir passé un an sur Le bal des enragés, à chanter des reprises, j’ai eu envie d’à nouveau créer mes propres chansons. J’ai composé près de quarante morceaux, que ce soit pour Les tambours du Bronx, pour Lofofora, pour Madame Robert (un groupe de Rhythm’n’blues avec mes copains de Parabellum, lancé après le décès de Schultz) ou enfin pour Mudweiser (mon groupe de Rock de « potes de bar » à Montpellier). Plus j’en fais, plus j’aime en faire. Je regrette de ne pas être plusieurs parfois.