Retour en fanfare avec saxo et harmonica pour Michael Monroe. Signe qui ne trompe pas, Le Parisien titrait la veille : « L’ex-chanteur des Hanoi Rocks se produit pour la première fois mardi prochain à Paris » avant de relater le concert le lendemain. Plusieurs raisons à cet engouement inattendu : le caractère plus qu’attachant de l’individu ; un album inespéré à ce stade d’une carrière en dents de scie (euphémisme) ; une époque rétive (probablement pour toujours cette fois, les Beatles n’apparaitront pas l’an prochain ni même dans deux ans) au Rock’n’Roll. Porté par une dynamique qu’il n’a vraisemblablement jamais connu auparavant, le dégingandé se retrouvait à nouveau porteur d’espoir, au moins pour l’espace d’une soirée : celui d’animer ou de réanimer la flamme, ou les flammes (celles du Rock décadent de 1973, du Punk de 1977, du Glam Metal de 1984, etc…). Salle perchée sur les hauteurs de Ménilmontant, mais n’ayant néanmoins pas connu les années folles des genres (établie en 2003), La Maroquinerie semble l’endroit idoine pour ce bain de jouvence, quelques heures après le passage à l’heure d’hiver. L’ambiance est chaleureuse et l’événement affiche quasi-complet. Une moyenne d’âge dépassant la quarantaine, nulle dégaine extravagante aux abords et à l’intérieur de l’enceinte, quelques cigarettes précautionneusement écrasées dans deux-trois cendriers disposés sur les tables du patio, des smartphones tendus à bout de bras devant la scène, peu de convives en état second, rappellent opportunément que le vingtième siècle s’est en allé il y a presque deux décennies.
Suspendu à l’extrême-gauche de l’estrade et agrippant d’une main une colonne tel Linus sa couverture, au risque de faillir sur un Pool informel de photographes (pas de Crash-barrière à la Maroque), l’auteur de ces lignes ne veut pas louper une miette de l’entrée en scène de la vedette. Ainsi que de son vrai-faux groupe. Lesquels déboulent sous les hourras, peu après les neuf heures du soir règlementaires, sur « One Man Gang » premier morceau du dernier album éponyme. Et bien nommé, tant ledit groupe vit la cohésion. Galures glamoïdes sur la tête, Steve Conte et Sami Jaffa épaulent leur patron et complice sur ses flancs gauche et droit. Dès les premières secondes de cette ritournelle endiablée, quelque part entre « Rocks Off » des Stones et « I wanna be Loved », Michael Monroe fonce au-devant (se colle, se frotte, s’agglutine, fusionne, fait l’amour, etc…) de son public. Comme un désir de rattraper les années foutues. Impression et gestuelle confirmées lors du génial Tube « Last Train to Tokyo », dédié à sa passion pour Yamato. Trois jeunes femmes japonaises sirotent d’ailleurs sagement un soda aux premiers rangs, et accessoirement s’offrent un bain de vapeur aux effluves occidentales. Car il fait désormais très chaud au sous-sol de la rue Boyer et le premier à transpirer est le chanteur lui-même. Affuté tel un makhila Basque, le regard perçant faussement menaçant, Michael Monroe va tout donner à des Glameurs défroqués et aux néophytes. Perpétuellement en mouvement, démonstratif et kinesthésique, le Frontman ne parviendra toutefois à déclencher de Pogo ou de mouvement de foule, l’assistance ravie préférant chanter et prendre des clichés.
Déconcertant professionnel, l’émacié Finlandais va néanmoins aligner deux heures durant les futurs classiques, pourtant issus d’un disque seulement âgé de dix jours : « Junk Planet », « Midsummer Nights », « Black Ties and Red Tape », « Hollywood Paranoia », « Low Life in High Places » (en rappel)… Le tout dans une stricte observance de la tradition Rock’n’Roll : foulard à étoiles arnaché au pied de micro (façon Steven Tyler ou Vince Neil), chapeaux divers (dont un de capitane de marine, Gay à ravir), mise à contribution des retours, éventail japonisant… Sa touche ultime demeurant l’usage du saxophone ainsi que de l’harmonica, alternant l’un et l’autre à ses lèvres lorsque qu’il ne chante pas (s’il a commis des excès, ils ne devaient guère être tabagiques…) : un des points forts de son premier Combo, Hanoi Rocks, dont trois titres seront repris aux alentours de l’heure de jeu (« Motorvatin’ », « Don’t You Ever Leave Me » et « Malibu Beach Nightmare ») ; ainsi que de son autre et inaperçu groupe de 1994, Demolition 23, à l’honneur pour deux brulots (« Nothin’s Alright » et « Hammersmith Palais » distribués en rappel). Peu avant, le brulant harmonica de « Dead, Jail or Rock’n’Roll », le seul véritable Hit (à ce jour) du Performer, aura raisonné. Final façon Guns’n’Roses au Ritz en 1988. Les Stooges seront ultimement repris (le morceau à propos de l’année qui fête son cinquantenaire en 2019). Et reste une question : quelle suite après ? Les années perdues ne pouvant être rattrapées en deux tournées Nippones et une Européenne, d’une trentaine de dates au total, gageons que d’autres s’ensuivront, et que le félin sexagénaire pourra s’agiter sur les Mainstages des festivals estivaux.
[masterslider id= »53″]