Art’n Roll : Enchanté de te rencontrer. Déjà, ma première question : c’est la signification de StuBorA. Car on ne connaît pas.
CYRIL: En fait, au départ, on existe depuis pas mal de temps. Quand on a monté le groupe, on voulait un nom un peu différent, et qui… ne veut pas vraiment rien dire. Donc en fait, StuBorA n’a aucune signification, si tu prends le mot en lui-même. Par contre, on était partis d’un mot anglais Stubborn, qui veut dire « entêté », parce qu’à l’époque on était un groupe de hardcore, puisqu’on s’est formés avant… notre premier album est de 1998. Donc du coup, on est partis vraiment sur une idée pur hardcore. C’était vraiment à l’époque du hardcore, il y avait Biohazard, il y avait beaucoup de groupes comme ça. Donc, on voulait quelque chose d’assez pêchu qui tranche, mais qu’il n’y ait pas vraiment une symbolique vraiment attachée. On voulait un nom, parce qu’on voyait d’autres groupes… en plus, à l’époque, nous on vient de la famille du thrash, donc il y avait Metallica, il y avait Slayer, il y avait beaucoup de groupes qui n’avaient pas forcément des noms avec des choses qui étaient attachées derrière, directement à un sens, à un mot. En fait, on a pris le mot Stubborn, parce que « entêté », à l’époque, ça ne correspondait bien. On était des gamins. Maintenant, ce n’est plus tellement le cas… mais on était vraiment partis sur cette idée d’entêtement, et on a décidé de ne pas garder le mot en tant que tel, mais de le raccourcir, et puis avoir une voyelle à la fin qui permettait d’avoir quelque chose… Stubora… qui est un peu plus sonnant. C’est de là que vient Stubora.
Art’n Roll : Très bien. Donc, ça fait 29 ans d’existence…
Cyril : C’est ça.
Art’n Roll : Pratiquement toujours le même line up ?
Cyril: Ah non, j’ai changé de batteur. En fait, au départ, on est un quatuor. On passe en trio pour le deuxième album qui devait être en 2… je ne sais pas quoi, je ne me rappelle même plus. Ensuite, en 2005 le bassiste s’en va. On change de bassiste et là, on décide de changer un peu, d’évoluer en fait. Ce qui a fait une grande différence dans le groupe, c’est qu’à un moment donné – ça faisait vraiment sept ans qu’on ne faisait que du hardcore assez dur, on va dire assez direct –, on a voulu changer et la personne qui est venue, Mick, le bassiste, il faisait aussi du chant. Comme il faisait du chant et qu’il était bassiste, ça a apporté quelque chose de différent. Moi, c’était l’époque où j’avais aussi envie de changer, le batteur de l’époque aussi. Donc, on a évolué un peu. On a eu une période de transition et ce n’est que récemment qu’on a eu une grosse période d’arrêt parce qu’on a eu quelques petits soucis, on va dire… Et on est repartis vraiment en 2014 quand le batteur est arrivé. Donc du coup, je suis le seul, puisque c’est moi qui ai monté le groupe à l’époque en 96… 95… ? Et je suis le seul du groupe original. Donc le bassiste, c’est 2004, je crois, un truc comme ça… 2005. Parce que je crois que le Lp qu’on a sorti avec lui, c’était 2005. Et le batteur, c’est 2014. En fait, même si le groupe existe depuis longtemps, on n’a pas l’impression qu’il est aussi vieux que ça, parce qu’il y a eu des histoires, pour moi aussi, parce que ça fait longtemps que je défends le groupe. Mais on a eu des histoires… On a un arrêt assez important parce que notre batteur de l’époque avait eu un gros accident, donc on a dû tout mettre en stand-by pendant un long moment, parce qu’on ne voulait pas jouer avec quelqu’un d’autre. En fait, on voulait l’attendre. Du coup, après, ça n’a pas fonctionné, on a reperdu du temps. Après, on est partis dans une recherche de batteur. Et on a sorti un album qui s’appelait « Résurrection » en 2015, début 2016, et ça a été presque comme un premier album. Parce qu’on s’est vraiment relancés avec cet album-là, on voulait se remettre sur les rails. On voulait tout remettre en place. Et ce nouvel album est presque comme un deuxième album, même si on a plus de 20 ans d’existence.
Art’n Roll : D’accord. Donc tu m’as expliqué pour cette longévité. Quelles sont en fait vos influences principales au niveau du rock/metal ? C’est ce qui nous intéresse toujours, surtout dans les groupes français.
Cyril: Bien sûr. Ce qui est marrant, c’est qu’on est trois et on a trois personnalités musicales complètement différentes. Mais on a un point commun qui est presque tout ce qui est « musique électrique » : rock/metal, c’est un peu ce qui nous définit. Après, moi j’aime bien beaucoup de choses un peu extrêmes, par exemple Whitechapel, Jinjer qui est un groupe en train de monter, vraiment extra.
Art’n Roll : C est assez proche de Arch Enemy ?
Cyril: Et en plus, je trouve que la chanteuse a une telle capacité à chanter du clair, du vraiment hargneux… avec une force, une émotion… elle est vraiment intéressante. Donc ça, c’est pour les trucs un peu plus récents. Après, on a comme point commun, toute la vague de thrash de la bay aera ça, ça notre époque. Donc tout ce qui est Metallica, Slayer, Testament, Death Angel tout ça, ce sont nos groupes en fait, c’est la base musicale de ce qu’on a. Après, maintenant, je dirais que moi, j’ai des tendances un peu extrêmes ; Mick a des tendances peut-être un peu plus rock avec Alter Bridge, ce genre de groupe. Niala est plus sur ce qui est technique parce que c’est un gros technicien, donc il adore tout ce qui est technique avec le batteur… comment il s’appelle, je ne me rappelle plus… Dream Theater ! Tout ça, lui, c’est ce qu’il aime bien. Mike . Donc ça, c’est ce qu’il adore, il adore tout ce qui est hyper technique, à la batterie, tout ce qui est à l’envers, tout ce qui est hors tempo, il adore tous ces trucs-là. Mais il aime bien aussi tout ce qui va être jazz… Tout ce qui est hyper technique en termes de batterie, ou qui apporte des choses complètement nouvelles. Et je pense que c’est ce qu’il nous a aussi un peu apporté dans le groupe. C’est-à-dire que quand il l’a rejoint, ça a été le match parfait. En plus, en trio, chaque musicien est hyper important, parce que c’est quand même 33 %, on va dire, de la musique. Il avait le jeu qu’on attendait parce qu’il est capable de soutenir des choses de manière assez classique, mais il est aussi capable d’apporter beaucoup de choses différentes, ou même des morceaux… par exemple, sur l’album d’avant on avait un morceau où il se mettait à contretemps et il revenait dedans. Là, il le fait aussi parfois. Il apporte aussi une vision rythmique qui va nous donner ou nous permettre d’autres idées.
Art’n Roll : C’est-à-dire que ça fait une bonne cohérence, chacun a ses idées.
Cyril : C’est ça. C’est pour ça qu’on a vraiment trois palettes différentes. On a une base qui est commune, forcément. Mais moi j’apporte un peu plus ce qui va être extrême ; Mick, un peu plus ce qui est la recherche de la mélodie, des harmonies ; Niala plus ce qui est la créativité rythmique. Mais en fait, tous les trois, on se complète assez sur tous ces aspects-là.
Art’n Roll : Au début, vous étiez considérés comme un groupe de metalcore ?
Cyril : C’est ça.
Art’n Roll : En fait, la raison de ce changement, tu l’as pratiquement expliquée… c’est l’évolution ?
Cyril : C’est à la fois une évolution et c’est en même temps… c’est un choix. Mais je pense que le changement des groupes, les rencontres, font qu’à un moment donné, musicalement, tu as envie de changer. En fait, je suis le seul qui faisais cette musique plutôt hardcore. Et à un moment donné, tes goûts aussi évoluent, musicalement ; ou ce que tu joues, tu as envie d’essayer des trucs différents. Après, j’ai toujours un attachement particulier avec la scène hardcore , parce que c’est là d’où je viens, et j’aime bien. Donc j’ai tendance à toujours avoir un petit œil surtout les groupes hardcore, c’est ce qui m’intéresse. Mais c’est vrai que c’est une évolution un peu naturelle avec des ajouts, des rencontres qui font que ça grandit, ça change. Voilà, ça s’est passé un peu naturellement.
Art’n Roll : J’ai remarqué que « Résurrection », votre avant-dernier album, a été bien accueilli par les critiques je voudrais savoir si ça a été un nouveau départ pour Stubora ? Si tu partages cette opinion ?
Cyril: Oui. C’est d’ailleurs pour ça qu’il s’appelle « Résurrection ». On avait eu cinq années où on n’avait rien fait, mais rien du tout. Comme je le disais, pour des problèmes avec notre batteur. On était arrivés à un point où on se posait aussi pas mal de questions. On voulait vraiment retrouver une dynamique. Donc c’est là, quand on a rencontré Niala – parce qu’on a rencontré d’autres batteurs, on n’était pas convaincus, on cherchait vraiment à retrouver de la force, de l’énergie, de la dynamique – et c’est vraiment ce qu’il nous a apporté. C’est pour ça que l’album s’appelle « Résurrection », c’est bien parce que c’est notre album de redémarrage. On m’a vraiment considéré comme un premier album. C’est pour ça qu’on n’a pas trop poussé beaucoup de choses avec cet album-là, on se remettait vraiment en selle. On a vraiment mis deux ans à travailler l’album, à le sortir, avant de se dire : voilà, on est vraiment repartis, on est vraiment là, il faut qu’on arrive à se remettre maintenant, à se relancer, il faut qu’on fasse un nouvel album.
Art’n Roll : Donc vous aimez un peu prendre votre temps entre chaque album ? C’est à peu près trois ou quatre ans…
Cyril : En fait, là, on souhaitait aller plus vite.
Art’n Roll : Pour des raisons personnelles ? Professionnelles ?
Cyril : On est un peu des « nazis de la musique », c’est-à-dire qu’on aime vraiment voir tous les détails. Par exemple, on a mis deux ans à faire cet album-là. Ça peut paraître étrange pour un groupe de notre niveau, se dire : pourquoi autant de temps pour enregistrer, travailler sur l’album ? Mais quand on a démarré l’album, on s’est dit : on le considère comme notre deuxième album, il faut qu’on sorte le meilleur de nous-mêmes. Depuis quelques années, on a investi dans un studio, donc on a notre studio. On enregistre nous-mêmes. Et tant qu’on ne sera pas satisfaits, on continue. Donc on a vraiment mis un an pour écrire un album, finaliser les compositions, et on a mis un an pour l’enregistrer. Pourquoi ? Parce qu’à chaque fois qu’on enregistrait, on voulait être capables de revenir – comme c’était notre studio – pour travailler et aller jusqu’au bout de nos idées. Bien sûr, on a connu des enregistrements, tu y vas, tu as une semaine, tu as 10 jours pour le faire. Et à chaque fois, on ressortait de là en se disant : il manque un petit truc, on a raté un truc sur ça, sur ça, sur ça… À chaque fois, on s’est dit : il faut qu’on arrête. La dernière expérience de studio qu’on a eue était, je pense, l’exemple parfait de ce que tu ne veux pas voir en studio : l’ingénieur du son nous a écrasé une piste. Une piste solo d’un titre, à l’époque, il l’a écrasée. Donc, on a été obligés de la ré-enregistrer. On s’est dit : merde, tu payes, et les mecs font vraiment n’importe quoi parce qu’ils sont là pour bosser, et l’expérience n’est pas terrible. L’ingénieur je pense que c’est un mauvais exemple, de parler de tout l’univers des ingé-son, mais il a fait une boulette… qui est pour moi une boulette que tu ne peux pas commettre quand tu es en studio. Parce que ce n’est pas bon pour le groupe, ce n’est pas bon pour la relation, pour rien… On s’est dit : voilà, peut-être qu’on doit investir. Et comme moi j’adore tout ce qui est travail du son… Je me souviens, ça remonte à pas mal de temps – je pense que ça doit faire 10 ans qu’on a notre studio – donc on a démarré petits, et puis on a investi à chaque album ; au lieu d’investir dans un studio externe on a investi dans notre studio, et on construit. Donc, je ne suis pas un professionnel, c’est-à-dire que je ne suis pas ingé-son de métier, mais au fur et à mesure, en discutant avec des ingé-son, en travaillant à droite et à gauche, ça nous a permis d’acquérir les notions et ensuite de perfectionner, et maintenant être capables de nous enregistrer et de travailler.
Art’n Roll : De faire vous-mêmes le travail.
Cyril: Ce qui explique aussi le fait qu’on est capables de prendre le temps nécessaire. Et comme on est ultra perfectionnistes, mais vraiment ultra perfectionnistes de tout ce qu’on fait, en termes de musique, de mélodies, d’effets, etc., on n’hésite pas à revenir en arrière pour toujours aller chercher le meilleur. C’est pour ça qu’on a besoin de temps. On n’est probablement pas non plus des gens ultra stressés. Mais on aime bien effectivement prendre le temps pour bien finaliser.
Art’n Roll : Donc l’album est sorti hier ?
Cyril: C’est ça.
Art’n Roll : Sous ton propre label ?
Cédric : En fait, on a une assoc’. On participe, il y a un webzine, il y a pas mal d’activités. Parce qu’en fait, depuis gamin, j’ai commencé les magazines, les fanzines…
Art’n Roll : Oui, comme tout le monde.
Cyril : Et j’ai toujours gardé ça parce que la musique fait partie de notre vie. Et puis, ça faisait partie du truc. À l’époque il y avait beaucoup d’indépendance dans la musique de ce style-là. Ça faisait presque partie du truc, tu étais à la fois participant, tu relayais les groupes des potes, tu allais chercher des trucs, les changer… pour moi, ça a toujours fait partie de la musique, c’est bien de participer, j’adore ça. J’aime bien aussi pousser des groupes français que j’aime bien, aider des groupes qui ne sont pas parvenus à émerger, c’est ça aussi que j’adore. Il y a plein d’activités. On a aussi fait de l’organisation en concert, on a fait des festivals. Maintenant, on a arrêté, c’est une question de temps, aussi. Mais c’était un ensemble. Effectivement, on le sent. À l’heure actuelle, on essaye toujours, on a eu des labels, on est passés par là. Maintenant, c’est un peu moins essentiel, avec la facilité de distribution, avec la facilité d’écoute aussi, parce qu’il y a beaucoup de gens maintenant qui écoutent les albums en ligne et qui n’achètent plus les CD, donc la distribution physique est un peu moins importante qu’avant. On a voulu garder aussi un peu d’indépendance par rapport à tout ça. On s’est dit : bon, on continue avec notre assoc’, on sort l’album nous-mêmes, ça reste une autoproduction. Ça nous va bien, parce que ça nous correspond assez d’être indépendants, de faire ce qu’on veut, et puis d’aller toujours travailler, chercher ce qu’on a envie, chercher le meilleur. Ça fait partie du truc, quoi.
Art’n Roll : On va parler de « Horizon noir » qui est plutôt noir, en fait. J’ai remarqué, il n’y a pas d’espoir de lumière, pour l’humanité , c’est votre pensée du moment, en fait ? L’album est sombre, noir.
Cyril : On a sorti notre album fin 2015 juste après les événements du Bataclan. Depuis, l’image est quand même assez sombre, sur ce qui se passe. Moi j’étais au Bataclan, aussi. Je suis resté quatre heures et demie au Bataclan.
Art’n Roll : Je ne savais pas.
Cyril : Ce n’est pas non plus quelque chose qui… mais moi personnellement, comme j’écris aussi des textes, j’avais forcément une vision et des idées assez sombres, etc. Il y avait aussi une constatation de tout l’environnement, de tout ce qui se passait, qui était quand même relativement sombre. C’est ce qu’on a voulu retranscrire dans les textes. Ce qui est assez marrant, pour le coup, c’est qu’on ne s’est rien dit avec Mick puisque, comme on est deux chanteurs, on ne s’est pas parlé sur les textes. On ne s’est pas dit : voilà ce qu’on va définir, on ne s’est pas donné d’idées. On ne fonctionne pas comme ça. Chacun amène ses émotions dans ses textes sans qu’on se concerte, et puis on regarde. Et en fait, tous nos textes ont un côté assez sombre, c’est vrai. Mais vraiment, c’est parce que ce sont nos émotions de ces dernières années, on a attaqué depuis deux ans, donc c’est ce qu’on a voulu retranscrire depuis deux ans. Ce qui nous vient, ce sont les émotions qu’on a, plutôt assez sombres. C’est aussi pour ça que ça s’appelle « Horizon noir », parce que pour nous, l’horizon, c’est le futur, et on le voit assez noir, par rapport à ce qui peut se passer en termes d’écologie, en termes de relations humaines, tout ce qu’on voit autour de nous. C’est ce qu’on reflète dans nos textes du dernier album. Il y a deux clips qui sont sortis, avant la sortie de l’album,
Art’n Roll : Le dernier clip à été tourné où ?
Cyril : C’est Montréal, j’y vais beaucoup. C’était un petit clin d’œil aussi à tous les gens, à tous les amis de Montréal. Les deux titres qu’on a choisis au départ c’était 1) pour montrer la continuité, les « Ténèbres éternelles », qui est plus dans ce qui est pêchu, dans la dynamique qu’on a, ce qu’on fait d’un peu plus Metal ; et au contraire, on voulait montrer quelque chose d’un peu différent, et on s’est vraiment lâchés sur ce nouvel album qui est « Soleil noir ». C’est un titre beaucoup plus rock, bien différent encore de ce qu’on a fait, pour montrer un peu ces titres différents qu’on a sur l’album, où on a été beaucoup plus loin sur certains titres. C’est aussi un peu l’idée du troisième extrait qui montre une autre facette. C’est ce qu’on a voulu montrer avec le premier titre, qu’on était quand même dans la continuité, mais qu’on a apporté des éléments différents, avec des titres un peu différents de ce qu’on a fait, qui restent en relation. C’est-à-dire que ça reste quand même du rock, du Metal, les mêmes influences. Mais montrer qu’on avait apporté des émotions un peu différentes.
Art’n Roll : C’est vrai que quand on écoute l’album on sent vraiment une évolution au niveau de la production. Quand vous avez travaillé pour l’album, vous vous êtes réunis dans le studio ? Ou chacun de son côté ?
Cyril : Chacun fait ses enregistrements tout seul. C’est un peu bizarre, mais comme on veut prendre du temps, chacun est ultra perfectionniste comme je te le disais. Donc chacun aime bien prendre le temps qu’il a envie. Mick et moi composons les titres, disons qu’on les pré-compose. Ensuite, j’ai un échange avec Mick pour tout ce qui est mélodies, guitare, etc. puis on vient voir Niala, entre guillemets, on se réunit avec lui, et Niala va challenger tout ce qui est rythmique, les enchaînements… Il apporte en fait tout son background rythmique, sa technicité pour challenger des choses. Et on remodèle, on retravaille les morceaux pour arriver aux versions définitives. De là, chacun repart avec le morceau qui est définitif puisqu’on l’a enregistré ensemble en studio-live, et chacun reproduit chez lui, puisqu’on a des home-studios chacun chez soi. On reproduit les morceaux, chacun enregistre, la batterie enregistrée…. parce que, comme on les a enregistrées avant, on a les bandes comme quand on est en studio, et on ramène tout en enregistrement final, on rassemble tous, et c’est là qu’on travaille à la production.
Art’n Roll : C’est vrai que le niveau est vraiment augmenté avec cet album, on le ressent. Il y a une nette évolution par rapport aux autres albums, c’est incroyable. J’ai beaucoup apprécié, d’ailleurs. Pour ma part, le meilleur titre c’est « Soleil noir » qui est pour moi est le plus fort de l’album. Tu peux m’en dire un peu plus sur ce titre ?
Cyril : Je ne peux pas trop parler des textes parce que c’est Mick qui les a écrits, ça lui est hyper personnel. Et même à moi, il n’a pas voulu tout me dire derrière.
Art’n Roll : Il n’y a pas… par rapport à Misanthrope , parce que je pense toujours à ce groupe qui parle souvent du soleil noir…
Cyril: Je ne sais pas. Je sais que pour lui, il est touché par tout ce qui se passe, par les choix actuels qui font qu’on a du mal à changer, en fait. Les humains ont du mal à se changer pour laisser quelque chose de bien pour nos enfants. Je pense que c’est quelque chose qui le touche, ça fait partie de « Soleil noir ». C’est peut-être l’un des titres les plus personnels. Bon, on en a deux ou trois qui nous sont très personnels en termes de textes. C’est un titre où il a énormément travaillé en termes d’écriture, parce que c’est écrit par lui, la musique et les paroles. C’est peut-être l’un des titres que l’on a le moins retouchés par rapport justement à la phase quand on se rassemble, etc., c’est un des titres… Niala c’est pareil, je pense que c’est un des titres qui a cliqué dans sa tête en disant : c’est un de nos titres les plus forts. Donc ça fait partie des titres à la fois les plus différents de ce qu’on faisait, mais aussi des plus forts de ce qu’on a sur l’album, il représente bien l’album de par ses textes, et qui donne vraiment cette ambiance, cette vision. C’est aussi pour ça que dans la vidéo on voulait un peu avoir ce côté nature, mais pas avec des couleurs tout à fait réelles, c’est pour ça qu’il y a un léger filtre sur les couleurs.
Art’n Roll : Oui, c’est sombre.
Cyril: Et tout a collé, tout allait bien. Ça fait partie des titres qui ont vraiment été directement représentatifs pour nous de l’album.
Art’n Roll : Pourquoi avoir décidé de chanter en français ? Après avoir fait… ce passage de l’anglais au français ?
Cyril : C’est assez bête. Je crois que le lp on l’avait fait en anglais. En fait, quand tu écris en anglais, déjà, étant Français, pour nous c’était en termes de recherche, d’émotion, etc. c’était un peu plus compliqué et puis on retombait toujours sur l’utilisation des mêmes mots – même si en français tu as toujours aussi des mots qui sont standards – ça, c’était un point. Et puis aussi, on savait que notre accent n’était pas aussi bon qu’on voulait. Comme je te disais qu’on adore aller jusqu’à la perfection, on s’est dit : voilà, on chante en anglais, on pourrait chanter en français, qu’est-ce qui fait qu’on ne chante pas en français ? On s’est rendu compte et on s’est dit que c’est plus parce que nos groupes venaient de San Francisco, on a toujours écouté de la musique en anglais, et autour de nous il y a aussi des groupes français qui marchent, qui chantent en français, qui permettent d’avoir beaucoup plus d’émotion, d’avoir aussi des textes qui touchent parce que c’est vrai que quand tu chantes en français, ce qui t’écoutent qui sont français, le texte devient hyper important. Quand c’est en anglais, tu écoutes la mélodie, parce que tu ne vas pas capter forcément tous les mots. Ou des gens qui ne parlent pas du tout anglais vont juste capter la mélodie. C’est aussi des fois pour ça qu’ils cherchent le chant en anglais. Mais nous qui voulions vraiment aller dans l’ultra-détail de tout, on s’est dit que c’était le bon moment pour le faire. Ça nous permet d’avoir des textes avec beaucoup plus d’émotion. Ça représente aussi d’où on vient, ce qu’on est. Ça collait parfaitement à l’image. On s’est dit : oui, ça sera un challenge, parce qu’aussi il y a beaucoup de gens qui n’aiment pas trop les groupes qui chantent en français. En plus, il y en a un peu moins peut-être maintenant que ce qu’il y a eu dans les années 80, il y avait peut-être plus de groupes qui chantaient en français. Mais pour nous, maintenant, ça fait partie du groupe, de ce qu’est le groupe à l’heure actuelle.
Art’n Roll : Le chanteur se sent plus à l’aise ?
Cyril : Oui, ça nous va mieux, ça nous permet d’avoir une palette beaucoup plus importante pour les textes.
Art’n Roll : Le Français passe très bien dans le metal maintenant.
Cyril : Il y a aussi des groupes comme Mass Hysteria ou Lofofora qui ont été un peu des rouleaux compresseurs. Et quand on voit ce qu’ils arrivent à faire, pourquoi ne pas chanter en français ? Surtout qu’on n’est pas un groupe qui va passer six mois de l’année aux États-Unis. Donc on n’a pas besoin d’avoir l’anglais pour se dire « on va s’éclater ». Tout matcher, en fait. C’est pour ça que c’était bien pour nous de se dire : on passe en français, ça nous colle bien.
Art’n Roll : D’ailleurs en parlant de ces groupes comme Gojira ou Mass Hysteria, je voudrais savoir ce que tu penses de certains groupes qui ont un succès phénoménal, ta position par rapport au metal en France aujourd’hui ? Tu en penses quoi, toi, de Ultra Vomit ?
Cyril : Moi j’adore ce que les groupes français ont réussi à faire. Ultra Vomit, ce n’est pas trop mon truc je préfère Gojira, et Mass Hysteria, j’adore. Ce sont deux groupes qui démontrent une énergie sur scène… c’est tellement hyper carré et tout, c’est hyper impressionnant. Je trouve que c’est bien d’avoir enfin des groupes à ce niveau-là. Quand tu vois Gojira, les tournées mondiales, tout ce qu’ils font partout, je trouve ça super. C’est le seul groupe qui arrive à être partout dans le monde. Maintenant, ils sont sur des affiches, c’est quand même incroyable. Mass Hysteria est revenu, depuis quelques albums, plus fort que jamais, ils sont à un niveau qui est juste incroyable pour du Metal français. Et de voir maintenant qu’il y a d’autres groupes, Ultra Vomit arrive maintenant à exploser, c’est bien. Parce que ça montre enfin que les groupes français ont le niveau. Pendant des années, on disait : ah, les groupes français, ça n’a pas le niveau…
Art’n Roll : Entre les années 80 et 2000 ?
Cyril: … et on voit maintenant qu’il y a des musiciens qui sont hyper talentueux, il y a des gens qui sont incroyables ; et il n’y a rien à envier ailleurs. Donc, c’est bien. Et je pense qu’au contraire, tout ce qui est fait pour soutenir les groupes, pousser des groupes… et au contraire les groupes français qui poussent, c’est vachement bien. Il faut que la scène française soit forte. C’est important d’avoir du soutien. C’est important de montrer aussi qu’il y a des artistes en France. Donc, tout ce qui peut être fait pour soutenir… voir qu’il y a enfin des artistes qui arrivent à ce niveau-là, c’est extra.
Art’n Roll : C’est extra, oui, tout à fait. Vous avez une tournée de prévue ?
Cyril : On est en train de travailler sur des dates, on n’a rien annoncé à l’heure actuelle. On a des dates, on les annoncera après, mais on travaille dessus.
Art’n Roll : Une tournée en France ?
Cyril: Uniquement en France pour l’instant.
Art’n Roll : Et vous allez faire des premières parties ?
Cyril: . Le dernier concert qu’on a fait, c’était en février ; c’était « Haunting the Chapel » avec Decapitated et Opeth. Et là, on travaille sur de nouvelles dates. Ça fait partie de nos objectifs d’avoir des dates, des bonnes premières parties, c’est ça qu’on aime. On fait des petites salles, on fait des concerts. Ce qu’on aime, c’est tourner avec des groupes qu’on adore. Donc, c’est ce qu’on vise. Là, on travaille sur notre recherche de dates, pour boucler nos dates. Et puis, on fera l’annonce prochainement.
Art’n Roll : D’accord. Que des bonnes choses pour Stubora pour l’avenir.
Cyril: Ça devrait, ça devrait…
Art’n Roll : Et on attend combien d’années pour le prochain album ?
Cyril : Disons qu’on attendra moins. À chaque fois, comme on a une façon un peu différente de travailler – parce qu’en plus, moi, je suis à Paris – les autres sont autour de Nancy… c’est pour ça qu’on travaille aussi à distance, chacun dans notre coin. En fait, avec l’album 1, on sait aussi qu’on a besoin de faire évoluer pour être capables d’aller plus vite. Donc, on attendra moins parce qu’on sait qu’on a besoin d’un an pour avoir un album. Ce qui veut dire que là, on va se donner un an pour faire des concerts, etc., et la deuxième année on va toujours faire des concerts mais on aura déjà commencé à démarrer, parce qu’il faudrait que le prochain album, ça soit deux, trois ans… Il faudrait qu’on soit un peu plus rapides, pour une fois.
Art’n Roll : Merci beaucoup. Super.
Cyril : Merci à toi.