HOT on the rocks!

Interview avec James Lascelles de Wheel

lundi/22/03/2021
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Wheel est un groupe de metal prog’ finlandais et anglais, lequel publie « Resident Human » son deuxième album le 26 mars 2021 chez Odyssey Music. Une somme complexe et concernée sous haute influence Tool. Mais pas que. ANR s’est entretenu par Skype avec le cérébral, mais humain, James Lascelles le 25 février de la même année, soit un mois et un jour avant.

 

Art’N’Roll : Salut ! Tout va bien ?!? Quel temps fait-il par chez toi ?

James Lascelles (Chant et guitare) : Hum ! (NDA : fort accent anglais) Il fait froid ici en Finlande ! Pour être honnête, il fait aux alentours de zéro pour la première fois en trois mois, c’est un redoux donc je n’ai pas trop à me plaindre. Je te montre, c’est toujours très enneigé dehors (NDA : il se lève du fauteuil de son bureau et montre la vue de la fenêtre de son salon) et chez toi ?!?

ANR : Très doux ici à Paris. Il fait dans les quinze degrés.

JL : Durant toute cette journée de promotion, mes interlocuteurs m’ont fait comprendre que je suis au mauvais endroit au mauvais moment pour ce qui est du climat (Rires)

ANR : Tout porte à croire que le printemps est déjà là chez nous.

JL : Tu me rends très jaloux.

ANR : Toi aussi, en fait. Au fait, as-tu reçu la guitare que tu as commandée chez Ruokangas Guitars en début de mois ?

JL : Je n’ai pas reçu la nouvelle, non. Ils m’ont fait savoir qu’elle était quasiment achevée. Je peux toujours te montrer la première qu’ils m’ont faite (NDA : il se relève promptement, revient et montre l’objet en gros plan, très voisin d’une Les Paul) Elle est franchement fantastique ! La nouvelle sera assez proche de celle-ci, avec des différences en matière de sustain. Ce sont de bons luthiers chez Ruokangas, ils ont connu beaucoup de soucis ces derniers temps à cause du Covid, ce qui a entraîné des retards dans la conception, mais ce sont de fantastiques professionnels ! Je sais que ce nouveau modèle sera parfait pour jouer en concert.

ANR : Alors, commençons par le basique… La première chose que nos lecteurs veulent savoir, afin d’employer une expression à la mode, est : pourquoi ce nom de groupe, « Wheel » ?

JL : Hum ! Je pense que… Bien que nous soyons un groupe qui ne cherche jamais la simplicité des apparences et qui aime creuser au plus profond des choses, un nom simple, facile à mémoriser, en anglais puisque Wheel est l’histoire d’un anglais en Finlande, s’imposait (Rires)

ANR : On vous décrit systématiquement comme « metal-prog » ou « prog-metal » avec des bouts de grunge à l’intérieur, description qui ne convient pas trop soit dit en passant… Quelles seraient les influences de Wheel ?

JL : J’ai grandi dans les années 1990, au moment où Oasis et Blur dominaient la scène musicale britannique, et j’ai découvert Nirvana, groupe qui m’a permis de m’intéresser à quelque chose de plus lourd. « Nevermind » est un album fabuleux, en dépit du fait que j’ai toujours trouvé sa production trop propre à mon goût, contrairement à celles de « Bleach », d’« Incesticide » et de « In Utero ». Je suis également influencé par Tool, et je vénère les arrangements contenus au sein d’« Ænema » : c’est incroyable comment cette formation composée de quatre personnes seulement ait été en mesure de créer un son si énorme ! Tenter de faire la même chose à la guitare a toujours constitué un défi pour moi…

ANR : Quel âge avais-tu lorsque « Ænema » est sorti en 1996 ?

JL : (Sourire) Je pense que j’avais treize ans. Mais j’ai découvert cet album plus tard, au début des années 2000, au moment où Tool a publié « Lateralus ». Ils savent parfaitement comment te faire voyager, créer des sentiments. Je te citerai également Radiohead, probablement un des groupes les plus intègres, ils étaient énormes lorsqu’ils ont sorti « Kid A » au début des années 2000, et la prise de risque à changer de direction artistique était maximale au sortir de leur période « OK Computer », leur démarche était si sincère qu’elle forçait l’admiration. Ils sont parvenus à changer radicalement de cap musical tout en délivrant une musique parfaite, cela m’a influencé même si je ne me considère pas tout à fait comme un « fan » de Radiohead. Je suis également influencé par Alice in Chains, Soundgarden, il y en a tellement !

ANR : Votre premier album publié en 2019, intitulé « Moving Backwards », a plutôt fait bonne impression. Quel bilan tires-tu de cette période, qui se termine le 26 mars prochain ?

JL : En premier lieu, de concerts fantastiques au cours de l’année 2019, notamment en Allemagne, et en première partie de groupes plus installés comme Children of Bodom et Katatonia. L’accueil qui a été fait à notre premier disque nous a réellement stupéfiés ! Nos morceaux sont souvent très longs, donc peu diffusables à la radio, pourtant tant notre management que le public nous ont de suite soutenus, et sans faille !

ANR : Votre deuxième album, « Resident Human », sort le 26 mars 2021. J’ai vu que vous avez attaqué le travail vers le début de l’année 2020… Je suppose que vous avez mis le vide de l’année 2020 à contribution afin de travailler sur ce disque ?

JL : Nous avions un certain nombre de dates de prévues pour l’année 2020, en tant que tête d’affiche ou en soutien à la tournée d’Apocalyptica. L’annulation de celles-ci a constitué comme une opportunité à nos yeux, celle de pouvoir travailler d’arrache-pied à la réalisation de ce disque. Pour être honnête, et de façon presque égoïste, je considère que c’était presque un luxe de pouvoir nous concentrer à sa conception !

ANR : Pandémie suite et fin. Pour ma part, j’avais projeté de vous voir en première partie d’Epica et de vos compatriotes d’Apocalyptica au Zénith de Paris en décembre 2020 puis en avril 2021, et qui est désormais reporté au 14 mars 2022… Vous avez néanmoins eu la possibilité de jouer dans deux festivals finlandais l’été dernier… Un mot sur le plaisir de pouvoir se produire au cours de l’année 2020 ?

JL : C’était spectaculaire, et tellement spécial. Nous avons pleinement réalisé la chance d’être dans un pays qui n’a pas annulé ses festivals. Je pense que nous n’étions pas les seuls à le penser, car y compris les spectateurs en état d’ébriété respectaient les distances de sécurité entre eux ! C’était gorgé d’émotion, et je considère que c’est un privilège de pouvoir vivre en Finlande, c’est vraiment un grand pays !

ANR : Vous publiez donc « Resident Human », et vous indiquez que la thématique des paroles de ce disque est inspirée par « Les Cantos d’Hypérion » (« The Hyperion Cantos »), qui est un cycle de space-opera composé de quatre romans publiés entre 1989 et 1998 par l’américain Dan Simmons… Je ne connaissais pas… Peux-tu nous en dire plus ?

JL : J’ai découvert cette œuvre il y a très peu de temps. Elle m’a bouleversé. J’avais téléchargé sur mon portable les différents livres qui la composent alors que les instruments et mes guitares de ce disque étaient déjà enregistrés, il ne nous manquait plus que mes parties de chant. C’est naturellement que les thématiques portées par « Les Cantos d’Hyperion » se sont imposées pour l’écriture des paroles. D’autant plus qu’elles sont d’actualité en cette période où tout est remis en question : « Que fais-je de ma vie ? », « Suis-je content ? ». Deux aspects m’ont semblé essentiels : le premier est la diversité des éléments qui composent l’univers, et le second est de savoir quelle est notre place en son sein, notamment quant à savoir si nous sommes ou non en mesure de pouvoir les influencer.

ANR : Wheel semble être un groupe imprégné de logique…

JL : (NDA : opine du chef en souriant)

ANR : Penses-tu que la logique est de ce Monde ?

JL : Je ne crois pas que nous pouvons nous contenter d’un simple « oui ». Nous sommes des créatures émotionnelles, et malheureusement les émotions ont pris le dessus, notamment pour ce qui est de la conduite politique de nos sociétés, nous l’avons vu avec la façon dont Donald Trump a fonctionné ces derniers temps. Il y a chez l’être humain une balance qui s’opère entre la raison et le ressenti, et c’est pareil pour ce qui est de la musique, nous ne pouvons uniquement nous contenter de créer de manière logique, rationnelle. Cette balance entre deux tendances opposées se retrouve d’ailleurs dans les systèmes politiques des grandes démocraties occidentales : le bipartisme de la Grande-Bretagne, des USA…

ANR : Pas de la France…

JL : Oui ! Effectivement ! (Rires)

ANR : Cela nous ramène à la phrase du général de Gaulle sur les opinions politiques des français et le nombre de fromages différents…

JL : C’est une exception, en effet !

ANR : Quel est le mot de la langue finlandaise que tu préfères ?

JL : Tu parles à un anglais, je ne sais pas parler finlandais !

ANR : Je sais, je sais…

JL : Je ne m’attendais pas à cette question ! (Rires) Je te dirais « mielenkiintoista », ce qui veut dire « intéressant » !

ANR : Je te propose de répondre à un questionnaire « Wheel » : je te donne un intitulé de morceau ou de disque qui contient le terme « Wheel » et tu me dis à quoi tu penses, d’accord ?

JL : (NDA : opine de la tête, bienveillant)

ANR : « Steel Wheels », The Rolling Stones ?

JL : Je ne connais pas cet album, mais j’aime les Rolling Stones…

ANR : Un album de 1989, très bon…. « Wheels of Steel », Saxon ?

JL : Je sais que c’est leur chef-d’œuvre, mais je suis infoutu de te citer une chanson de ce disque, Saxon ne fait pas partie de ma culture musicale… (Rires)

ANR : « The Big Wheel », Rush ?

JL : Notre bassiste est un grand fan de Rush, je suis embarrassé car je n’ai pas grand-chose à te dire à propos de Rush…

ANR : « Wheels of Confusion », Black Sabbath ?

JL : Ça botte le cul ! Je suis un grand fan de Black Sabbath !

ANR : « Behind the Wheel », Depeche Mode ?

JL : Depeche Mode ! J’ai oublié de les mentionner parmi mes influences ! J’ai récemment réécouté leur premier album, et j’aime beaucoup ses sonorités !

ANR : « Spoke in the Wheel », Black Label Society ?

JL : (Rires) Je ne connais aucune de leurs chansons, je ne suis pas la bonne personne à qui poser cette question ! (Rires)

ANR : Alors peut-être « Wheels of Fire », de Cream ?

JL : Cream, je peux mieux en parler. Je suis fan d’Eric Clapton en tant que guitariste, notamment de « Crossroads » que je reprenais seul sur scène avant de former Wheel, cela fait partie des morceaux classiques que j’aime jouer, je suis très très fan de son travail !

ANR : Quel est ton guitariste préféré ?

JL : Mon Guitariste préféré ? C’est très délicat d’en choisir un seul… Je peux en choisir trois ?

ANR : Ton ou tes guitaristes avec un « s »…

JL : D’accord, cool ! Guthrie Govan est un guitariste si ambitieux et si libre dans sa façon de s’exprimer ! Je te dirai également Adam Jones de Tool, à mon sens Tool c’est avant tout Adam Jones, j’aime son groove et sa rigueur. Et Mårten Hagström, le guitariste de Meshuggah, ce qu’il fait à la guitare huit-cordes est tout simplement incopiable.

ANR : Un mot de la fin ?

JL : Oui, à destination des français : ma mère est française, et je me suis rendu en France jusqu’à mes quinze ans chaque année quand j’étais petit. J’aime les gens, j’aime la cuisine, j’aime le vin, et cela me manque de ne pas pouvoir me rendre en France : lorsque cette putain de pandémie sera derrière nous, la première chose que je vais faire sera de venir en France, et de profiter de toutes ces bonnes choses !

ANR : Et moi de voir Wheel en première partie d’Apocalyptica et d’Epica !

JL : Merci beaucoup, c’était un plaisir, take care !

ANR : Merci James !

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