Installez vous dans votre fauteuil et prenez part au voyage. Oubliez le reste, le temps de ces quarante-cinq minutes d’album et profitez.
(tout est résumé dans cette phrase de Clémence Santé ,bassiste de Spheres)
Rencontre avec Jonathan Lino et clémence de SPHERES au Fellgood Roquette le 13/09/22
Merci à Roger de replica.
Art’N Roll : Merci Jonathan de nous recevoir.
Jonathan : Merci à toi.
Art’N Roll : Deuxième album pour Spheres, Helios, alors que veut dire ce titre ? Parce que l’héliosphère c’est l’espace, c’est le système solaire ?
Jonathan : Alors, hélios en grec veut dire soleil.
Clémence : Hélios c’est le dieu du soleil en grec.
Jonathan : Voilà. C’est le dieu du soleil. Et l’héliosphère c’est la dernière ceinture d’astéroïdes, c’est la bordure de notre système solaire, c’est la borne d’entrée vers l’espace, la limite extrême de ce qu’est notre …
Clémence : … notre jardin.
Jonathan : Voilà. Le premier album s’appelait Iono ce qui est la dernière couche de la terre avant l’espace, donc c’est la première porte d’entrée, la découverte, le premier album, le début du voyage. La deuxième étape, la deuxième porte de sortie ou porte d’entrée c’est l’héliosphère. C’est un peu comme une trilogie. On a déjà le nom du troisième en fait !
Art’N Roll : Avant de parler de cet album, pour quelle raison vous faites du prog ? Est-ce que c’est parce que tu es ingénieur du son ?
Jonathan : Ben ! vas-y Clémence, toi qu’est-ce que tu en penses ?
Art’N Roll : Pourquoi ce style ?
Clémence : Mmm ! C’est juste un style qu’on apprécie beaucoup. On a un peu tous essayé dans notre coin de faire des trucs plus « simples », moi j’ai déjà fait de la pop et du rock-FM…
Clémence : J’aime bien ce côté challenge qu’il y a dans le prog, et mon but c’est de faire de la musique facile à écouter, mais quand tu essayes de regarder en profondeur et d’analyser, tu te rends compte que ce n’est pas du tout facile à faire.
Art’N Roll : Le prog ce n’est quand même pas facile, il faut écouter plusieurs fois un album?
Clémence : Je pense que là, nos morceaux s’écoutent assez bien, mais ce n’est pas si simple que ça à jouer.
Art’N Roll : C’est vrai que cet album est assez surprenant par rapport à votre premier, c’est un nouveau palier. C’est comme ça que vous le ressentez ? Est-ce qu’il a été dur à concevoir cet album ?
Jonathan : Non, mais je vois bien, sans aucune prétention, que le résultat est plus mature. La production est bien meilleure, les guitares sont beaucoup mieux, les sons de claviers sont plus travaillés, plus choisis.
Je pense aussi que j’ai été à l’écoute de certaines critiques que nous avaient faites les journalistes sur des choses qui pouvaient être améliorées, surtout sur les voix saturées, donc j’ai beaucoup travaillé ma voix pour arriver à ce résultat. On nous disait aussi que ça manquait parfois d’une direction artistique claire, ou une certaine forme d’homogénéité. Je pense qu’on l’a atteinte, tout en gardant quand même ce côté prog – à un moment donné si c’est du prog il ne faut pas non plus trop se limiter – c’est une musique faite de multiples reliefs. Donc, je pense que le pari est réussi !
Art’N Roll : Il y a beaucoup d’orchestration, est-ce que vous avez utilisé des samples ? Comment vous l’avez travaillé, cet album ?
Jonathan : Alors, pour les compositions j’ai écrit quasiment l’ensemble des squelettes de l’album, à l’exception d’un titre qui a été écrite par le guitariste, Olivier, Algorithmic Sentience, dont je suis le parolier, mais c’est une composition d’Olivier.
J’ai composé les autres. En fait, Olivier arrive généralement avec un arrangement assez abouti, j’écris les paroles. Pour ma part, je construis vraiment un squelette. C’est-à-dire que je pars plutôt de riffs de guitare, je pars d’un modèle de musique. J’essaye d’écrire une trame et quand je suis satisfait avec des préprods de batterie et de claviers, là, je m’attache au sujet de départ. Parce que je pars toujours d’un sujet. J’imagine un nom, une émotion, un sujet ; à partir de là je vais écrire la musique je vais maquetter quelque chose et je vais écrire les paroles. Donc, j’ai une structure avec une préprod de batterie, des guitares rythmiques et des voix, j’envoie tout ça aux gars et on correspond ensemble. Ils ont la matière à la maison pour pouvoir bosser dessus, faire des arrangements. On se retrouve au studio et là ça part en coulle !!!! le connard ! … mais non ! c’est pas vrai ! (Rires)
Clémence : (Rires)
Art’N Roll : Un vrai tyran de de studio?
Jonathan : Non, ça va ! Je ne suis pas un tyran en studio par contre quand je parle . suis jeté ! (Rires)
Clémence : Après, on est là pour bosser alors, vraiment si tu parles trop, on va te dire : « Tais-toi, travaille ! » Normal.
Art’N Roll : Vous avez des invités sur l’album ?
Jonathan : Oui. Marco.
Art’N Roll : Tu peux m’en parler un peu ?
Jonathan : Lui, Il a plusieurs projets de dark wave . D’ailleurs il joue son projet solo à un festival qui s’appelle Hypermondes et qui a lieu ce week-end (24-25 septembre). Un festival de science-fiction avec quelques artistes dans le genre. On devrait être programmés l’année prochaine, mais c’est loin dans l’agenda.
Je suis un peu claviériste, mais, lui, est designer sonore. Il a cette capacité à apporter tout ce côté très synth-wave, dystopique avec ses sons. On a réalisé un travail avec Marco sur les arrangements des claviers. J’ai fait une première mouture, mais il a vraiment apporté sa touche.
Il y a mon pote Florian Soum qui est venu faire un solo sur Pandemia ; un gros shot de guitare.
Art’N Roll : Oui on va en reparler de ce titre Pandemia.
Jonathan : Et puis, mon ami, André Fernandez, qui est chanteur dans la chanson française, mais qui aime bien le metal, c’est un gros fan de Kiss et qui était ravi de venir faire des backing-vocals.
Art’N Roll : C’est étrange d’avoir un chanteur comme lui sur votre album ?
Jonathan : Oui, c’est très bien !
Art’N Roll : Cette nouvelle pochette d’album, qui représente la science-fiction, tout ce qui est fantastique, c’est ce que tu préfères ? Je pense à Soleil vert, ces films-là, un peu 70. On ne pense pas au fantastique d’aujourd’hui, mais à celui des années 70 et 80. On le ressent dans certains de tes clips?
Jonathan : Oui. Déjà pour l’artwork on l’a fait dans un esprit de continuité et on a gardé le même artiste Julien Grelet qui nous avait fait l’artwork du premier album. J’aime bien parce qu’il a une touche assez late seventies.
Art’N Roll :Vous mélangez un peu la musique électronique et cette ambiance années 70 ressort beaucoup chez Spheres?
Jonathan : Oui. Toujours dans cette volonté, cette fois-ci, de clarifier un peu plus notre direction artistique et voilà un peu les directions qu’on s’était données : c’était d’obtenir quelque chose de plus lourd, de plus homogène en termes de son entre les morceaux et d’accentuer plus amplement et plus profondément les ambiances dark-wave, synth-wave, c’est-à-dire tous ces vieux de sons claviers qui datent un peu d’avant l’avènement du pur digital.
On est plutôt sur des claviers analogiques, on a utilisé beaucoup de Moog, de Prophet, tous ces sons de claviers que l’on retrouve dans les bandes originales comme celles de Vangelis dans Blade Runner, ou de manière bien plus récente dans des groupes comme Carpenter Brut.
Art’N Roll : Carpenter Brut, c’est une grosse référence. C’est tout nouveau ça ?
Jonathan : Oui, c’est de la dark-wave, synth-wave, qui cartonne en ce moment. C’est vachement bien !
Jonathan : D’ailleurs on veut lui proposer un remix d’un de nos morceaux.
Art’N Roll : Pandemia, se trouve être le titre le plus long et poétique ?
Jonathan : Oui. Celui-ci j’avais envie de le structurer un peu comme un morceau d’Opeth avec un chapitre qui en amène un autre, et un autre, et un autre.
Clémence : C’est le type d’histoire qui est raconté au fur et à mesure.
Jonathan : Complètement.
Art’N Roll : The Running Man le plus surprenant ?
Jonathan : (Rires) in 2021 .after a global warmaing the world’s economy is in shambles and as become a totalitarian dystopia.( jonathan chantonne le début du titre)
Art’N Roll : C’est donc ta voix au début du titre?
Clémence : Oui, c’est sa voix et au cas où tu te poserais la question, la partie à la fin avec un chant très bizarre, au fort accent allemand, c’est aussi sa voix.
Art’N Roll : Tu en utilises plusieurs du coup ?
Jonathan : (Rires) L’accent allemand ça marche bien quand on veut parler de textes.
Clémence : Bizarrement, ça marche bien. C’est très cliché, mais c’est efficace.
Jonathan : J’espère qu’ils ne m’en voudront pas ? Parce que j’ai plein de potes allemands, mais notre génération on se charrie beaucoup dans la joie et la bonne humeur. Mais, Running Man, en fait c’est directement inspiré du livre du même nom écrit par Stephen King, qui est aussi un ouvrage dystopique. Dans lequel le monde tel qu’on le connaît, est dirigé par les plus grosses chaînes de télévision qui ont le contrôle sur toute la population ; plutôt des social media… C’est l’histoire inspirée du livre de Stephen King, mais c’est une adaptation très maladroite et très approximative avec une production années 80. Le film est raté et il est mauvais, mais c’est la même chose. Ce que raconte ce livre, en fait, ce sont les chaînes de télévision qui contrôlent toute la population et les classes les plus populaires vendent leur corps et âmes à des reality tv-shows, qui sont des espèces de snuff tv-shows, où les gens se font buter en direct. On leur fait miroiter des millions de dollars s’ils échappent à la mort, mais personne n’en réchappe jamais, les dés sont tronqués, bien évidemment. Mais, ça permet d’amuser la plèbe, comme les jeux du cirque à l’époque de Rome, il ne faut pas trop qu’ils réfléchissent, voilà.
Donc, il y a un côté un peu théâtral dans cet ouvrage, où à la fin, il finit par pirater un avion et s’écraser sur les tours de cette chaîne de télévision. Du coup, le personnage devient complètement fou et je voulais retracer un peu cette folie. À la fois, il y a une ouverture, au tout début, avec cette voix off un peu bizarre , Comme dans beaucoup de films des années 80, que je regarde, comme Terminator et aussi Running Man, il y a toujours une voix off comme ça.
Clémence : C’est ce qu’avait fait aussi Michael Jackson avec Thriller. Donc, je voulais mettre ça. C’est peut-être le morceau le plus théâtral de l’album.
Art’N Roll : Vous avez des passages assez grandiloquents et épique qui me font penser à manowar et virgin steel ?
Jonathan : Manowar, On se pointe à nos concerts nous! ( rires)
Jonathan : En même temps on n’en a pas beaucoup (Rires).
Art’N Roll : Un clin d œil à pantera avec le riff de SCS ?
Jonathan : Euh… Un, zéro, zéro… (Rires)
Clémence : Je ne sais pas ce qu’on a répondu tout à l’heure ? Avec Jesse le batteur, ça nous fait penser plus à du Slipknot. C’est un gros riff et un martèlement qui accélère, qui accélère, et après, ça part complètement sur du gros bourrinage . Par contre, est-ce que c’est volontaire ?
Jonathan : En fait, à un moment je me suis dit : « Oh ! ce serait peut-être bien, maintenant que j’ai un truc un peu accrocheur, simple, je voulais une petite cartouche. » Et, puis, rapidement je suis parti en couille avec une partie planante. (Rires) La nature revient au galop. Mais, j’aimais bien l’idée d’avoir un riff un peu metal indus, simple, efficace, clair, vraiment ! Dum, dum, dum, (il chante).
Art’N Roll : Je vois que tu es un fan de Meshuggah, Gojira, tous ces artistes qui font du metal technique?
Jonathan : Dans Meshuggah, la technique va vraiment au-delà de la maîtrise d’un instrument. Il est vraiment plus dans des polyrythmies qui vont dans tous les sens et il faut vraiment être doué en math. On n’est pas aussi complexes quand même !
Ce qui est prodigieux chez Gojira, les morceaux ne sont pas si compliqués que ça, mais la qualité d’exécution est magnifique. C’est d’ailleurs pour ça qu’ils sonnent si bien en live. Certains groupes de metal c’est de la bouillie, mais eux, ça joue au cordeau.
Clémence : C’est très, très, carré. Il n’y a rien qui est de travers, et ça bourrine, c’est hyper efficace !
Jonathan : C’est ce qu’on aime et c’est ce qu’on essaye de faire quand on est en répétition et qu’on est sur scène.
Art’N Roll : Avec ce deuxième album on a vraiment l’impression que vous avez franchi un palier, quel est l’avenir maintenant ? Est-ce que vous vous dites : « C’est bon, on a réussi à trouver notre propre style. » Par rapport au premier album où on sentait que vous vous recherchiez un petit peu, alors que là, c’est parti. Quelles sont les prochaines étapes pour Spheres ?
Jonathan : Les deux clefs pour moi : j’aimerais qu’on ait un manager. Ça nous ouvrirait pas mal de portes, ça nous permettrait de nous concentrer plus sur la musique. Parce qu’en fait, on gère beaucoup de choses en interne. Un groupe ce n’est pas juste jouer des concerts et enregistrer des albums. Et surtout un tourneur, ou à minima un booker.
Art’N Roll : Vous avez des projets de tournées ? Est-ce que vous allez arriver à rendre sur scène cette ambiance autour de Spheres ? Comment vous vous voyez sur scène ? Vous allez faire un mix entre le premier et le deuxième album ?
Jonathan : Oui, on a déjà préparé la setlist. On joue quand même très majoritairement du nouvel album, il faut le défendre. Il y a peut-être Running Man où on attendait d’avoir un bel arrangement live. On veut un petit peu le tisser avant (Rires). On ne va pas tarder, on commence déjà à le jouer.
Mais on joue déjà tout l’album dans son intégralité. Et puis, dans la setlist, on a gardé des morceaux comme Television Nation, The Thing et Stellar, du premier album.
Art’N Roll : Vous allez tourner avec Synapse, vous faites un concert le 29 octobre. Ce sont des jeunes, qui sont bien lancés et qui ont sorti un nouvel album excellent.
Clémence : Ils ont le vent en poupe Synapse. ( Lire mon interview de ces jeunes prodiges sur le site)
Art’N Roll : Vous avez votre release party le 23 septembre?
Jonathan : Oui ! On va faire une soirée le jour de la sortie. Vous êtes tous conviés ! On va diffuser les clips, on va boire de l’eau, euh ! On va écouter l’album, on va faire un stand de merch , il y aura aussi pêche à la ligne, chamboule-tout… (Rires)
Clémence : On avait dit pêche aux canards !
Jonathan : Ouais ! pêche aux canards, concours de mecs t-shirts mouillés ! (Rires)
Art’N Roll: Que du bon pour la suite de Sphères. (Rires) Apparemment !
Jonathan : Allez ! on va faire de la musique aussi. (Rires) On va faire un petit showcase quand même. Ils ont la dalle, on ne va pas les laisser partir le ventre vide !
Art’N Roll : La sortie de l’album ?
Jonathan : C’est le 23 septembre chez M&O Music…même jour de notre soirée dans ce lieux superbe ( feelgood roquette)
Art’N Roll : …distribué par Season of Mist, toujours ?
Jonathan : Oui, toujours par Season of Mist, on a une distribution en France et aussi en Angleterre, États-Unis, Benelux, Allemagne. Chez nos amis belges chez qui on s’en sort très bien et où nous sommes toujours bien accueillis
Art’N Roll : Si tu as un mot pour pour défendre cet album ? Si vous avez un message à faire passer ?
Jonathan : Achetez-le ! (Rires)
Jonathan : On a sorti un vinyle pour celui-là, vous pourrez le trouver dans tous vos magasins, sur Bandcamp, le site de Season of Mist.
Clémence : Installez-vous dans votre fauteuil et prenez part au voyage. Oubliez le reste, le temps de ces quarante-cinq minutes d’album et profitez.
Art’N Roll : Comment vois-tu ton public quand tu vas jouer prochainement ?
Jonathan : Oh ! je pense qu’il y a suffisamment de relief pour être à la fois contemplatif, rêveur et avoir envie de se défouler. Il y a toutes les portes qui sont ouvertes. Ça peut faire du wall of death et du pogo…
Clémence : Comme passer dix minutes à complètement phaser sur la musique.
Jonathan : Voilà.
Art’N Roll : Un futur clip peut-être ?
Jonathan : Oui. On va sortir le deuxième single et clip de l’album le 12 octobre. C’est le titre Algorithmic Sentience qui est le premier morceau de l’album.
Art’N Roll : Je n’ai pas trouvé votre marque de bière ?
Jonathan : On l’avait fait avec le premier album, est-ce qu’on va le refaire ? Why not ? Ce n’est pas si simple que ça à gérer en fait. Ça marche bien, les gens aiment ça. Plus que la galette !
Clémence : On s’est fait un super projet génial !
Jonathan : Écoute, il y a une brasserie à Montreuil qui s’appelle la Croix-de-Chavaux, je suis en pourparlers avec lui. Je vais réfléchir.
En fait, il faut quand même un certain volume de dates parce que sinon, ça va rester à la maison et je vais toutes les niquer ! (Rires). En fait, c’est ce qui s’est passé. Pour info, j’en avais commandé un gros stock, on avait plein de dates programmées après mars 2020, donc en pleine Bérézina, et puis, tout d’un coup : « Tu vas rester chez toi ! » et au début j’ai dit : « Non ! il ne faut pas toucher au merchandising quand même ! ». (Rires) Ça n’a pas duré longtemps !
Clémence : Après les deux mois de confinement!.
Jonathan : Je suis un mauvais dealer j’ai consommé toute ma dope ! Un an plus tard, j’avais fini… j’ai mis du temps quand même à les finir.
Art’N Roll : Bon, on espère la goûter prochainement?
Jonathan : Oui, je vous tiens au courant.
Jonathan : En tout cas en plus des CDs, des vinyles, les t-shirts on va mettre les partitions en ligne. Voilà. Un plug anal aussi c’est en projet aussi. (Rires)