Art n’ Roll : On est là pour parler de votre dernier album, « Steelhammer ». Comment s’est passé l’écriture depuis que Stephen a quitté le groupe ?
UDO : Et bien, évidemment, c’est différent de travailler sans Stephen, après toutes ces années. Il a décidé de quitter le groupe à cause de ses problèmes de santé. D’abord il m’avait dit : « Faisons le prochain album ensemble, la production, l’écriture… » et puis finalement, il a eu besoin de faire un break, il ne pouvait pas faire le prochain album studio et voulait réfléchir à ce qu’il voulait faire à l’avenir, déménager son studio dans une autre ville. J’étais d’accord, je n’avais pas le choix.
Art n’ Roll : Il a travaillé un peu sur Steelhammer ?
UDO : Non pas du tout. Il m’avait dit que si jamais j’avais besoin d’aide, il serait là, je n’avais qu’à l’appeler. Du coup je me suis demandé qui allait pouvoir le remplacer. Fitty (Wienhold), le bassiste ? Il avait déjà écrit de bonnes chansons pour UDO. Alors je lui ai proposé d’en écrire d’autres avec moi. Il a accepté et on a écrit tout l’album ensemble. Après, il fallait trouver un producteur. J’avais beaucoup de noms, dont mon ami Michael Wagener. Je l’ai appelé, il a dit « ok, mais quand ? ». J’ai répondu : « Maintenant ! » mais ce n’était pas possible pour lui, il était pris avec Lordi. Il m’a demandé pourquoi je ne le faisais pas moi-même. J’étais pas très chaud pour, à cause de toutes ces nouvelles technologies, mais il a insisté et finalement c’est ce qu’on a fait et on en est très contents.
Il y a eu un changement de guitaristes aussi. C’était pas vraiment prévu, surtout 2 guitaristes d’un coup.
Art n’ Roll : Oui, comment s’est passé le recrutement ? Il y a eu des auditions ?
UDO : En fait, on a juste fait une annonce dans quelques magazines, on a reçu 300 démos. Ca faisait beaucoup.
Art n’ Roll : et ces démos venaient d’où ? Des Etats-Unis, d’Allemagne ?
UDO : J’étais surpris : environ 120 venaient des Etats-Unis. A la fin, on hésitait entre 4 mecs : Andrey Smirnov de Russie, un gars de Norvège, un autre d’Allemagne et Kasperi (Heikkinen) de Finlande.
J’ai hésité à prendre Andrey, pas à cause de son jeu de guitare, mais parce qu’il vient de Russie. Je sais qu’il peut y avoir des problèmes pour voyager, obtenir des visas. Mais je suis passé outre : je voulais auditionner ce gars. Il est venu pour auditionner et au final il a joué pour tout l’album. Il est resté en Allemagne 4 semaines. On a eu un problème de timing avec Igor (Gianola) : il ne pouvait pas venir en studio avant 4 ou 5 semaines. Il a proposé de faire comme avec Stephen, enregistrer les parties séparément. Or, je voulais que tout le monde soit là en studio, physiquement. Je lui ai demandé s’il voulait vraiment participer à l’album, il m’a répondu que oui, mais qu’il ne pouvait pas être là tout de suite. Et entre-temps, comme Andrey était là, on n’a pas attendu, on a enregistré avec lui. Igor est arrivé après coup, il nous a dit qu’il avait envie de participer à la tournée. Pour moi, c’était ok. On a eu une proposition pour un concert en Equateur, c’était le premier concert avec Andrey. J’ai informé Igor de ce concert en Equateur pour qu’il organise son trajet jusque là-bas. Mais un jour plus tard, il m’envoie un mail pour me dire que ce n’était pas possible pour lui, qu’il avait besoin d’être prévenu 2 ou 3 mois à l’avance. Quoi ? 2 ou 3 mois à l’avance ??? Du coup, je l’appelle pour savoir ce qui lui arrivait. Il me dit que 2 ou 3 jours, ce n’est pas assez. Je lui explique que c’est comme ça que ça se passe. Il me répond que la tournée de 2 ou 3 mois pour Steelhammer, c’est trop pour lui, parce qu’il a trop de projets parallèles, son groupe de cover de AC / DC, son propre groupe, son travail en free lance pour une radio. Je lui ai demandé de bien réfléchir : est-ce que son groupe de cover était plus important que UDO ? Il m’a répondu que sa décision était prise et il a laissé tomber 15 ans de collaboration avec UDO comme ça.
Je ne pouvais pas le forcer à rester… et il a fallu trouver un deuxième guitariste. Donc à part Andrey, il y avait les 3 gars, Kasperi, celui de Norvège et celui d’Allemagne. On les a appelé mais l’allemand et le norvégien avaient déjà trouvé d’autres contrats. Il restait Kasperi qui a été d’accord pour nous rejoindre, après 30 minutes au téléphone.
Art n’ Roll : ils sont assez jeunes.
UDO : Andrey a 29 ans et Kasperi 32 ans.
Art n’ Roll : Est-ce que c’est difficile de travailler avec des gens plus jeunes ? Peut-être qu’ils ont envie de faire la fête…
UDO : Non… pas vraiment.
Art n’ Roll : ils sont plus sages, peut-être ?
UDO : Disons que… comment expliquer… Andrey est plus joueur sur scène, tandis que Kasperi est plus mûr. C’est une bonne combinaison, de même pour leur style musical. Ils sont tous les deux brillants, mais avec des jeux différents. C’est vraiment une combinaison parfaite. Je suis chanceux d’avoir trouvé ces deux gars. J’aurais pu prendre quelqu’un de connu, mais j’ai préféré prendre un inconnu, je trouvais ça plus intéressant. Et ces deux gars apprennent très vite, et se mettent en phase avec nous très facilement. La tournée en Amérique s’est très bien passée, c’est comme si on avait déjà passé 2 ans ensemble. La chimie est fantastique. Ils amènent une nouvelle énergie au groupe. Fitty dit que c’est un nouveau départ pour UDO. Moi j’ai déjà des idées pour un prochain album.
Art n’ Roll : Il va y avoir une tournée européenne ?
UDO : Oui on va faire quelques festivals, en Allemagne, en République Tchèque, Finlande, Suède…
Art n’ Roll : Et Paris ?
UDO : Oui on viendra en tournée. Pour l’instant c’est booké pour la Russie, la Baltique, la Scandinavie, l’Allemagne et puis la France, l’Italie… surement à la mi-décembre. C’est une longue tournée.
Art n’ Roll : A propos de Steelhammer, l’album est génial, de même que votre voix ! Quel est votre secret pour garder la puissance de votre voix?
UDO : Pas de secret ! Je crois que j’ai juste de la chance. A chaque album, je peux en faire plus avec ma voix, dans les graves, dans des tons plus doux. Je ne sais pas, je crois que j’ai juste beaucoup de chance. Je ne fais rien de spécial, je ne renonce à rien.
Art n’ Roll : Vous avez expérimenté un nouveau style de chant dans cet album, vous chantez en espagnol, pourquoi ?
UDO : J’ai toujours eu en tête de faire une chanson en espagnol. Avec Accept, on avait fait une chanson en espagnol : « Amamos la vida », mais seul le titre était en espagnol. Et pour cet album on a écrit « Dust and Rust » qui parle de la crise qui traverse l’Europe en ce moment. Je vis en Espagne, Fitty aussi et voir les news à la télé nous a donné envie d’en faire une chanson. On a appelé Victor Garcia, le chanteur de Warcry. On était en tournée avec eux en Amérique. On lui a montré les paroles et demandé s’il était possible de les traduire en espagnol : il a dit « Ok ! ».
Après une semaine, il nous a appelé pour nous dire que la chanson devenait vraiment lourde de sens. Ca nous allait très bien, vu la situation européenne. Il nous a renvoyé les paroles traduites avec une démo sur laquelle il chantait. La chanson était vraiment intéressante. Et voilà l’histoire de la chanson « Basta Ya » !
Art n’ Roll : Une autre chanson, « Heavy Rain »… Dans une interview, vous expliquez que vous avez quitté Accept parce que le groupe prenait une direction mélodique qui ne convenait pas à votre voix. Or, Heavy Rain est vraiment mélodique…
UDO : Et bien, c’était il y a très longtemps… En fait, je n’ai jamais quitté Accept, ils m’ont viré, c’est complètement différent !
Art n’ Roll : ah oui ??
UDO : En fait ils voulaient être complètement différents, sonner plus « américain », une partie du groupe vivait là-bas… c’est une longue histoire. Et depuis, pour cet album, Steelhammer, Fitty est venu me voir un jour avec une chanson. Quand je l’ai vu, j’ai répondu que ce n’était pas du tout mon genre, et il a insisté en disant que je pourrais très bien chanter ce style-là.
Art n’ Roll : Ca fait très crooner !
UDO : Ouais… donc je dis ok, je suis ouvert d’esprit, finissons d’écrire les paroles. Et puis je fais une démo pour voir comment ça tourne, à quoi ça ressemble. Et bien, ça fonctionnait ! La mélodie n’est pas facile à chanter, pour moi c’était pas habituel. Ça m’a montré que je pouvais faire plus de choses. Et maintenant j’adore cette chanson. Certains disent que je dépasse les limites, que c’est trop soft. Peut-être, mais je suis content d’avoir fait cette chanson, ça me permet de faire plus avec ma voix.
Art n’ Roll : Ce n’est pas la première fois. Vous avez chanté avec Doro…
UDO : Oui avec Doro, j’ai chanté « Dancing with an Angel », j’ai chanté « Tears of a Clown ». En fait, j’ai fait plusieurs chansons qui allaient dans cette direction.
Art n’ Roll : Je suis sure que vous avez remarqué : en concert de très jeunes fans connaissent par cœur les paroles de « Balls to the Wall » , qu’est-ce que ça vous fait ?
UDO : C’est très intéressant : ça veut dire qu’on peut créer des chansons qui durent pour toujours. C’est aussi une nouvelle génération qui arrive. Il y a 3 ou 4 ans, j’ai vu un changement dans le public. Avant il y avait les vieux gars des années 80 et puis ça s’est mis à rajeunir de plus en plus avec des jeunes de 16 ans. Ils n’étaient même pas nés à l’époque ! Ça veut dire que ce genre de musique ne meurt jamais ! Et c’est important d’écrire des chansons qui soient fidèles à ce qu’on pense. Mais on ne peut pas faire que des classiques. Du coup en tournée, on change souvent la setlit.
Art n’ Roll : Mais vous continuez à jouer « Balls to the Wall » ?
UDO : Oui évidemment ! Et aussi beaucoup de titres du nouvel album, et d’autres de UDO qu’on n’a jamais joué avant, ou pas depuis très très longtemps. Avec deux guitaristes, on va pouvoir jouer des titres qu’on ne pouvait plus jouer avec Stephen et Igor. Il n’y a rien de mal à ça, mais maintenant j’ai 2 guitaristes solo. Ça va donner une belle setlist !
Art n’ Roll : Dernière question : est-ce que vous travaillez encore sur votre autobiographie ?
UDO : Oui…
Art n’ Roll : est-ce que vous savez quand elle sortira ?
UDO : Non pas vraiment, j’ai été occupé par l’album, l’écriture, la production et tout le reste… ça m’a pris environ un an. Je vais me remettre à travailler sur le livre pendant la tournée européenne. J’aurai plus de temps, on a toujours du temps en tournée, quand on voyage ou qu’on attend avant un concert. Pour le moment, on a encore pas mal de choses à faire. Ça va prendre encore 2 ans. Le problème pour moi est de savoir quand m’arrêter, à quel moment de la carrière. Ça continue, il y a toujours de nouvelles choses. Il faut que je trouve une conclusion.
Art n’ Roll : Un dernier mot pour vos fans français ?
UDO : Et bien, on va venir pour quelques concerts en France, Paris et une autre ville, et d’autres villes j’espère, à la fin novembre, je pense. D’ici là, écoutez le nouvel album, Steelhammer, et : « Stay Heavy ! »