Auteur : Pentagram
Titre : Lightning in a Bottle
Label : Heavy Psych Sounds Records
Sortie le : 31 janvier 2025
Note : 17/20
Des premiers albums de Pentagram, je garde en tête deux ou trois choses. La première est cette production surannée, des morceaux dont on ne sait s’ils ont été enregistrés dans les semaines qui ont directement suivi Altamont, ou dans les années 1980 voire même 1990. Un son blafard, orangeâtre, agrémenté de brûlants solos woodstockiens, au niveau technique en somme toute assez basique, qui viennent brouiller les repères de la chronologie rock. La deuxième est la qualité, qu’écrive-je, la transcendance de certaines des chansons, à l’image de « Starlady », de « Forever my Queen », de « Be Forewarned », ou de « Last Days Here ». Des compositions parfois plaintives, des fois implacables, systématiquement hallucinées. À elles seules capables de raviver la fièvre doom au mitan des eighties, et même bien après. Et la troisième chose qui m’a marquée est indubitablement Bobby Liebling. Un frontman singulier, unique, stratosphérique, une improbable collision entre Agecanonix et Michel Fugain période Big Bazar sous LSD. Un dingo peu recommandable aux mirettes exorbitées, un compositeur prolifique mais désespérément poissard (et peu lucide), pour ces raisons adulé des mordus de stoner doom. C’est donc un peu à l’aune de ces trois considérations que j’ai chroniqué Lightning in a Bottle qui sort ce vendredi chez Heavy Psych Sounds.
À première écoute, il n’y a pas de tube, hymne, en tous cas de chanson qui se mémorise immédiatement. Pour ce faire, il faudra y revenir et, ça tombe bien, la préparation du passage de Pentagram le vendredi soir en tête d’affiche de la Valley me donnera l’occasion d’y revenir. Tout porte à croire que le groupe a voulu passer en revue l’ensemble des canons du genre. Comme dans une sorte de catalogue dressé au crépuscule de leur carrière. L’album s’ouvre par un riff quasi-martial (« Live Again »). Celui de « Thundercrest » est encore plus rosse, inhabituellement furibard quand on connaît le répertoire du combo. Le bouillant « I Spoke to Death » lorgne méchamment du côté de Monster Magnet (à l’exception du chant). Il y a un thème en deux accords façon « Gloria » de Them ou « Good Fortune » de PJ Harvey : c’est sur « I’ll Certainly See You in Hell », une chanson de seulement 2 mn 08. « Spread Your Wings » possède quelque chose de Sub Pop dans l’idée. Comme parfois chez eux, un titre contient le mot fétiche « Lady » : cette fois, c’est « Heroin Lady ». Comme le temps passe vite : nous sommes déjà fin janvier et Pentagram a cinquante-quatre années d’existence ! La production de ce dixième album studio constitue l’agréable surprise de ce Lightning in a Bottle. Elle parvient à ne pas trahir l’esprit vintage du groupe tout en adaptant celui-ci au goût du jour. Les guitares et la voix sont impeccablement restitués. La voix, venons-y. Liebling est le dernier membre de la formation originale. Le Virginien fêlé a fêté ses soixante et onze tours du soleil le mois dernier. Du moins physiquement, car mentalement il a dû certainement en faire bien davantage. Ce n’est pas un grand chanteur au sens technique du terme, mais c’est un excellent interprète. Sa façon d’appréhender chaque chanson diffère du tout au tout, tour à tour autoritaire, menaçant, incantatoire, gaillard, lancinant, trippant, toujours fantasque… À l’instar de ses musiciens, Liebling passe en revue tous les canons du genre. Ses fans seront en conséquence comblés.