HOT on the rocks!

Interview avec Schmier de DESTRUCTION

dimanche/02/03/2025
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Art’N Roll: Plus de 40 ans de carrière, comment réussissez-vous à garder cette énergie et cette agressivité intactes dans votre musique ?
Schmier: Je pense que la musique est très inspirante, tu sais, et quand on part en tournée, les fans sont très enthousiastes et nous renvoient beaucoup d’énergie. C’est pour cela que nous avons filmé ce clip pour la chanson Destruction au Brésil, comme premier single, afin de montrer l’enthousiasme que les concerts peuvent avoir et nous transmettre. Je pense que c’est très inspirant, quand on revient d’une tournée et qu’on retourne en studio, on a encore ces souvenirs dans la tête. La musique est un cadeau pour moi, et je suis encore capable de le faire après 42 ans.
C’est fou, et c’est vraiment une grande source d’inspiration de pouvoir encore le faire.

ANR: En parlant de la chanson Destruction, elle semble être très importante pour le groupe.
Dans les paroles, tu chantes « ce rêve est devenu plus grand que la vie« . Quand tu as créé Destruction, aurais-tu imaginé devenir une référence mondiale du thrash metal ?

Schmier: Non. Parfois, je me dis que si je pouvais parler à mon « moi » plus jeune, il n’aurait jamais cru ce que nous avons accompli. Parce que, quand nous étions jeunes, on ne voulait pas être de vraies rock stars. On voulait jouer de la musique, passer un bon moment, sortir de la petite société conservatrice allemande dans laquelle on était. On n’aurait jamais imaginé que ça arriverait. C’est pour ça que « ce rêve est devenu plus grand que la vie » était l’un des messages importants. Parfois tu dois aussi réfléchir à ce que tu as accompli pour avancer et être fier de ce que tu fais.

ANR: Pour moi, Destruction résonne aussi comme un hymne autour de votre identité et votre parcours. Qu’est-ce qui t’a inspiré à l’écrire ? Et peut-on dire que cette chanson résume l’essence du groupe ?

Schmier: Oui, elle le fait, parce que ça nous a pris très longtemps d’écrire une chanson nommée Destruction, comme le groupe. Et quand je l’ai écrite, je me suis demandé ce qu’il fallait y mettre. Musicalement et aussi au niveau des paroles. Et je parle des paroles comme des paroles de Manowar. On revient un peu aux racines et on apprécie les racines. Mais en gros, c’est aussi une lettre d’amour aux fans. Parce que sans les fans, on ne serait pas ici. C’est pourquoi dans le refrain, je dis « nous sommes Destruction », et je veux que les fans chantent « nous sommes Destruction », parce qu’ils font partie du groupe. Et c’est aussi pour ça que nous avons filmé le clip comme ça. Ça nous a pris 42 ans pour écrire une chanson appelée Destruction, donc elle devait être bonne, non ? 

ANR: Pour moi le clip quand je l’ai regardé, j’ai vu une lettre d’amour à vos fans.

Schmier: Il n’y a rien d’autre à dire, alors. C’est exactement ça!  

ANR: Parlons de Cyber Warfare. Cette chanson aborde des thèmes modernes, comme le pouvoir de la technologie. Penses-tu que le thrash est le bon moyen pour dénoncer ces excès de notre époque ?

Schmier: On vit aussi dans un monde moderne, et on doit utiliser la technologie. On utilise le streaming, YouTube et les réseaux sociaux. Et je pense que ça a beaucoup d’avantages, mais le côté négatif, c’est qu’internet est aussi mal utilisé pour façonner les opinions, pour les changer.
Cyber Warfare, c’est des bots attaquant. Nous avons eu des bots qui ont attaqué notre Facebook quand la guerre en Ukraine a commencé. Des bots russes ont attaqué notre Facebook parce que nous avons annulé des concerts en Russie. Et nous avons vraiment vu des milliers de bots nous attaquer. Je me suis alors rendu compte qu’internet est devenu une arme, aujourd’hui.
Si tu vois les problèmes qu’on a avec les politiciens, internet divise les gens, gauche et droite, rouge et vert, tout est comme ça. Et ce qui est faux et vrai aussi. 50 % de ce que tu lis sur internet n’est pas vrai. Alors, les gens doivent vraiment remettre en question ce qu’ils lisent. C’est compliqué. Et c’est pour ça que j’ai écrit la chanson Cyber Warfare.
La chanson elle-même est un très vieux morceau de speed metal, mais le message est très actuel. Et je pense qu’il est important d’en parler.

ANR: Ensuite, tu as fait un cover de Fast as a Shark d’Accept. C’est un super hommage à des amis. Pourquoi avez-vous choisi cette chanson en particulier et comment avez-vous travaillé l’interprétation ?

Schmier: En gros, c’est la première chanson de speed metal d’un groupe allemand. En 1982, quand elle est sortie, c’était un nouvel horizon pour nous. C’était waouh, j’étais très jeune et c’était tellement spécial et tellement rapide. Alors on a pris cette chanson comme inspiration pour Destruction aussi.
Les riffs, les voix, le refrain, le solo, tout était génial. Et je me souviens que cette intro, c’était presque une gifle pour les Allemands conservateurs. Pour nous, petits ados, c’était la révolution, c’était notre petite rébellion contre la société. Cette chanson a commencé tout ça. Et même mes amis punks aimaient cette chanson. Pour te dire à quel point elle était spéciale. Et la reprendre, ce n’est pas facile, parce que c’est déjà une super version. Tu ne peux pas vraiment la faire mieux. Alors on a essayé de la faire à notre manière, on a essayé de la rendre plus rapide et un peu plus thrashy. Je pense que ça a bien tourné. Et les réactions des fans ont vraiment été géniales. C’est pourquoi on l’a mise sur l’album. On ne voulait pas la mettre au départ. On l’avait sortie en single avant sur vinyle. Et tout le monde nous disait « s’il vous plaît, mettez-la sur l’album. » Et on s’est dit, OK. D’accord.

ANR: Vous avez une chanson nommée A-N-G-S-T. Qu’est-ce que ça signifie ?

Schmier:Angst c’est le mot allemand pour peur. Et la chanson parle principalement de la peur qui peut dominer ta vie.Je ne sais pas comment l’expliquer mais c’est une expression en anglais qui dit que les Allemands ont peur de beaucoup de choses. Parce que les Allemands réfléchissent trop. (il faut faire attention ici, faire attention à ça). Et cette chanson parle en gros de ça, que trop réfléchir limite ta vie. C’est pour ça que j’ai utilisé le mot allemand Angst. Comme on est un groupe allemand, je pensais que c’était une bonne idée. La chanson parle d’anxiété, mais aussi d’un message de rébellion contre la peur et la manipulation. C’est un sujet de santé mentale, très important de nos jours. La peur peut vraiment contrôler les gens.J’ai vu cela chez plusieurs amis qui souffrent d’anxiété. Pendant plusieurs mois, ils ont perdu le contrôle. Ils ne pouvaient rien faire, ils étaient juste assis là. Je me suis beaucoup renseigné à ce sujet. En Allemagne, cela fait environ cinq ans que l’on parle d’anxiété. Avant, les gens disaient : « Anxiété ? Qu’est-ce que c’est ? Sois un homme et tais-toi ! » C’est exactement ce qu’on disait avant. J’ai commencé à lire beaucoup à ce sujet, car aux États-Unis, il y avait déjà beaucoup d’études sur l’anxiété. Puis j’ai conseillé à mes amis de consulter un médecin, de changer leur mode de vie, de changer de travail, de faire du sport. La peur, c’est quelque chose qui peut vraiment contrôler votre vie. Ce n’est pas seulement l’anxiété, c’est aussi que les médias et les gouvernements utilisent la peur pour contrôler les gens. C’est ça le sujet de la chanson.

ANR:  C’est très intéressant quand on écoute votre album et qu’on lit les paroles. On constate que vous êtes un groupe très engagé? 

Schmier: Parfois, je me dis que ça serait plus facile d’écrire des paroles sur des licornes et des dragons et de boire. Mais ça me pousse à écrire des paroles sur des choses qui me dérangent, des choses qui ont du sens pour moi. C’est un peu comme une petite thérapie.

ANR: On a pu également découvrir le clip de A-N-G-S-T, qui ressemble à un film d’horreur.

Schmier: Oui, exactement. L’idée était de faire une sorte de film d’horreur. Nous voulions recréer l’atmosphère sombre et très groovy de la chanson dans le clip. Nous avons eu l’idée de créer des monstres qui nous ressemblent. Il y a aussi ces monstres sur la couverture de l’album, c’est inspiré de l’œuvre du même artiste, Gyula Havancsák. C’est une artiste hongroise, et elle a peint ces monstres pour nous. Ensuite, on a essayé de les faire « vivre » dans le clip. Le clip parle des peurs qu’on a tous. Par exemple, il y a cette scène avec le monstre sous le lit, vous savez, comme quand on était enfant et qu’on avait peur qu’il y ait un monstre sous le lit. L’idée était de matérialiser ces peurs dans cette vidéo.

ANR: Vu que tu parles de la couverture de l’album, comment le travail a été réalisé?

Schmier: Le concept était d’utiliser notre crâne et de laisser le mal surgir de notre logo et de notre crâne. On a travaillé ensemble pendant plusieurs années. Je lui ai envoyé les paroles des chansons, et on a travaillé dessus. La couverture a été réalisée assez rapidement. Quelques jours seulement, et on a eu cette idée du monstre sortant du logo. C’est tout de suite devenu clair. Parfois, on passe des mois à travailler sur une couverture sans être satisfait, mais là, c’était instantané. C’était exactement ce que je voulais.

ANR: L’album sort le 7 mars, quels sont vos projets pour après ?

Schmier: Nous avons des concerts et des festivals à venir. Et après l’été, on va commencer une tournée en Europe, avec des shows en France et partout dans le monde. On prévoit aussi de retourner en Asie, en Amérique, etc. Beaucoup de projets à venir.

ANR: Un film sur le groupe va sortir, peux tu m’en dire plus? 

Schmier: Le film sort dans les cinémas allemands et aura sa première mondiale en mars à Berlin. Ensuite, on espère qu’il sera projeté dans d’autres pays. Il s’agit d’un documentaire sur le groupe, qui couvre cinq ans de notre vie, y compris la pandémie, notre 40e anniversaire, et tout ce qui s’est passé. Il y a des moments dramatiques et des concerts incroyables. Ce film offre un regard derrière les coulisses, sur ce qui se passe vraiment, pas seulement sur scène.

ANR: L’interview arrive à sa fin, si tu as un dernier mot à dire ?

Schmier: J’espère qu’on verra bientôt tous nos fans français. Nous allons revenir en tournée et en festivals, et nous sommes prêts à conquérir. Merci à vous !

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