Artiste: Tarja Turunen and Mike Terrana
Album: Beauty and the Beat
Date de sortie : 30 mai 2014
Fer de lance du Metal symphonique, Nightwish est aux chanteuses nordiques à voix ce que les Yardbirds ou Thin Lizzy furent aux guitaristes anglo-saxons : un groupe qui les révèle, puis leur donne un billet de sortie pour une carrière solo. Léger hasard du calendrier, celle qui a tenu la note pour eux de 1996 à 2005 a sorti fin mai un double disque live, en collaboration avec le batteur studio Mike Terrana. Soit deux mois précisément après celui d’Annette Olzon, qui l’avait remplacée à ce poste, avant d’être remerciée à son tour par Tuomas Holopainen et les siens en 2012 (voir notre chron’ d’avril). Pourtant, et hormis leur commune inclinaison pour les sections cordes plutôt que cuivres, il n’y aura que peu de comparaisons à effectuer entre les deux créations des dames à fourreau et cheveux noirs jais. Pendant que la Suédoise se balade toute seule dans les steppes par moins trente, la Finlandaise revisite le classicisme musical sous toutes ses déclinaisons. Et autant dire que réaliser la chron’ de ce double Live relève de l’exploit pour le néophyte. Car le parti-pris de la cantatrice et de son requin de studio l’est délibérément. D’ailleurs, certains auditeurs seront rebutés par le nombre d’instrumentaux.
Le CD1 est dédié à la partie classique ; le CD2 à quelque chose de plus Rock, entre reprises et compos de Tarja. « Concert for violin » de Bach est assez pompier, on dirait une sorte de Jam entre Rondo Veneziano et le batteur de Fear Factoy. On passe également sur « Barber of Seville », « New World Symphony », « William Tell Overture » et « Eine Kleine Nachtmusik », lesquels reprennent des thèmes de la Grande musique (respectivement Rossini, Dvořák, Rossini et Mozart excusez du peu). Idem, pour « Can-Can », qui comme son nom l’indique, est le thème du French Can-Can d’Offenbach (les roulements de grosse caisse par-dessus sont juste épouvantables). Cependant, « Blute Nur », « Zuiegmumg », « Song to the Moon » et « You take my breath away » (de Queen), où nous revient la familière et diaphane voix de Tarja, sont bel et bien magnifiques. Il en est de même pour « Vilja Lied », ses cordes et son flutiau, et « O moi babbino caro » (de Puccini). Symphoniques, les splendides « The Reign », « Witch-hunt » et « Into the Sun », figurent sur le CD2 et plairont aux fans du genre. « I Feel pretty » (Bernstein) et « Mein Herr Marquis » (Strauss) sont des opérettes.
Ces titres feraient involontairement penser à une ou deux sottises des Sex Pistols sur « The Great Rock’n’Roll Swindle ». Sauf que le propos des Pistolets du sexe était parodique et cynique (avec le très classieux Eddy Barclay en Guest), ce qui n’est pas le cas sur le présent album. La démarche de la Metal Goth Godess, née en 1977, et de l’ancien batteur de Malmsteen est tout le contraire de Punk, et se situe d’ailleurs sur la rive seventies opposée : sur « Led Zeppelin Medley », ils livrent de jolies versions symphoniques de « Kashmir », « Immigrant Song» et « Starway to Heaven » du dirigeable baba. En tous cas, ces vingt-et-un Live inégaux donnent envie d’en voir plus en concert. Il est dit que la chanteuse la plus populaire de Finlande, dotée d’une authentique voix de cantatrice, et ayant commencé le chant classique à l’âge de quinze ans, avait développé une (légitime) frustration de ne pas évoluer parmi les artistes de cette veine. Ce qui explique le pourquoi du comment de cette double livraison. En tous cas, le chroniqueur a, quant à lui, parfois ressenti comme une (relative) frustration de ne pas posséder une solide culture classique en l’écoutant.